typiquementdĂ©lirant, tantĂŽt dĂ©clarant que le fou câest lâhomme libre (en ceci quâil est affranchi de la demande) 5. La thĂ©orie de la . forclusion sâinscrit au contraire sur le versant de cet aphorisme Ă©crit par Lacan sur les murs de la salle de garde, « Ne devient pas fou qui veut », dans une optique de discontinuitĂ© radicale entre
Culture Il Ă©tait le plus provocateur des psychanalystes. Trente ans aprĂšs la mort de Jacques Lacan, le Seuil publie deux inĂ©dits, que "Le Point" prĂ©sente en exclusivitĂ©. Jacques Lacan, "Le sĂ©minaire livre XIX... ou pire" Ă©ditions Seuil, et "Je parle aux murs" entretiens de la chapelle de Sainte-Anne, textes Ă©tablis par Jacques-Alain Miller Ă©ditions Seuil. © Jerry Bauer Tout fou Lacan, titrait LibĂ©ration au lendemain de sa disparition. Fou, il l'Ă©tait peut-ĂȘtre devenu sur la fin, selon divers tĂ©moins. Mais, trente ans aprĂšs, la question n'est pas lĂ . PlutĂŽt pourquoi ceux qui le suivirent aprĂšs Mai 68 ont-ils acceptĂ© d'ĂȘtre par lui rendus fous ? Et surtout le plus connu des psys français est-il en passe de revenir hanter la psychanalyse comme un fantĂŽme ?Que reste-t-il de nos amours lacaniennes ? Car, il faut le reconnaĂźtre, dans l'incroyable attachement de milliers de disciples Ă la parole oraculaire du maĂźtre, il y avait avant tout de l'amour. Un amour presque passionnel, sacrificiel "Perinde ac cadaver." Certains en sont morts. D'autres s'en nourrissent encore. Comment sĂ©parer l'amour de la vĂ©ritĂ© de la vĂ©ritĂ© de l'amour ? Il est impossible de dĂ©nouer le lien fatal qui fait qu'on croit aimer quelqu'un parce qu'il parle bien et dit le vrai, alors qu'on croit qu'il maĂźtrise la langue et dĂ©tient la vĂ©ritĂ© parce qu'on l'aime. Nous sommes tous soumis Ă ce que Pascal appelle "la confusion des ordres".Cependant, trente ans aprĂšs sa mort, il est temps de tracer un bilan de l'apport de Lacan Ă la psychanalyse et Ă la culture, sinon impartial, du moins Ă©quilibrĂ©, entre la gratitude envers telle dĂ©couverte et le rejet de telle autre, sans cĂ©der Ă l'hagiographie commĂ©morative ni Ă l'aigreur fĂ©condsNous sommes dans l'aprĂšs-Lacan. Non au sens oĂč il aurait marquĂ© un "avant" rĂ©volu et ouvert une Ăšre nouvelle, encore moins d'un sauveur ou d'un prophĂšte pas de datation entre "avant JL" et "aprĂšs JL", mais au sens oĂč sa recherche continue de susciter des dĂ©bats fĂ©conds mĂȘme chez ceux qui s'en sont nous lĂšgue-t-il ? Quelques aphorismes fulgurants "le dĂ©sir, c'est le dĂ©sir de l'autre", "l'amour, c'est donner ce qu'on n'a pas Ă quelqu'un qui n'en veut pas". Des calembours d'Almanach Vermot, "poubellication", mais aussi de brillants mots-valises "hainamoration". D'incroyables proclamations de gĂ©nie "Moi, la vĂ©ritĂ©, je parle". Des grossiĂšretĂ©s de salle de garde, rachetĂ©es par des distinctions opĂ©rantes entre besoin, demande et dĂ©sir, par exemple, ou frustration, privation et castration. Quelques fulgurantes lumiĂšres mĂȘlĂ©es Ă tant de prĂ©ciositĂ©s obscures. Comme le disait l'un des maĂźtres de Lacan "Quand l'eau est trouble, on ne voit pas s'il y a du poisson ou non."VĂ©ritĂ© rĂ©vĂ©lĂ©eLa seule question est dĂ©sormais que faire de tout cela, et en a-t-on vraiment besoin pour soigner un patient ? Les deux textes aujourd'hui publiĂ©s et dont Le Point prĂ©sente, en exclusivitĂ©, des extraits essentiels, datent de la pĂ©riode 1971-1972 et tournent autour de cette proposition en forme de vĂ©ritĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e "Il n'y a pas de rapport sexuel." Cela signifie-t-il que le rapport entre les sexes n'est pas de l'ordre de l'harmonie préétablie, de la complĂ©tude heureuse, mais du conflit et du ratage ? Que la sexualitĂ© ne rapporte rien et qu'on ne peut rien en rapporter, ni en dire ou en Ă©crire, parce que, justement, "ça ne parle que de ça" ? Ce sont des Ă©vidences connues depuis Freud. Mais cela ne masque-t-il pas en rĂ©alitĂ© une conception pathologique de la sexualitĂ© il n'existerait pour les sexes aucun moyen de se rapporter l'un Ă l'autre ? Si cet Ă©noncĂ© Ă©tait vrai, combien d'entre nous seraient rassurĂ©s de ne pouvoir pas se rapporter Ă l'autre sexe ! Que conclure de cette lecture ? Je prĂ©fĂšre la phrase dĂ©licieuse d'un personnage de Proust, Mme Leroi "L'amour ? Je le fais souvent mais je n'en parle jamais."Ce "SĂ©minaire" nous donne le mĂ©lange instable et fascinant d'un Lacan provocateur Ă une rĂ©flexion toujours vivante sur la psychanalyse et de sa fuite dans la "mathĂ©matisation" de l'inconscient sexuel qui en est pourtant le noyau central. Michel Schneider, auteur de Lacan, pĂ©riode fauve PUF, 2010.Jacques Lacan, Le sĂ©minaire livre XIX... ou pire Seuil, 264 p., 23 euros, et Je parle aux murs entretiens de la chapelle de Sainte-Anne, textes Ă©tablis par Jacques-Alain Miller, Seuil, 128 p., 12 euros. Parution le 25 aoĂ»t. Saison lacanienne En librairie - 1er septembre Vie de Lacan, de Jacques-Alain Miller Navarin, 24 p., 5 euros, et sur . 1er septembre Lacan, envers et contre tout, d'Elisabeth Roudinesco Seuil, 15 euros. - 13 octobre Lacan au miroir des sorciĂšres, numĂ©ro spĂ©cial de la revue La Cause freudienne Diffusion Volumen, 20 euros. Ă la tĂ©lĂ©vision - 5 septembre, 22 h "Rendez-vous chez Lacan", de GĂ©rard Miller, France 3. ĂvĂ©nements - 9 septembre Lecture non stop de Lacan Ă l'Ăcole normale. EntrĂ©e octobre journĂ©es Lacan au Palais des congrĂšs, Ă Paris. Une vie1901. NaĂźt Ă Paris. 1932. Soutient sa thĂšse de psychiatrie. 1964. Fonde l'Ecole freudienne de Paris. 1966. " Ecrits " Seuil. 1980. Dissout l'Ecole freudienne. 1981. Meurt Ă Paris. Je m'abonne Tous les contenus du Point en illimitĂ© Vous lisez actuellement Que reste-t-il de Jacques Lacan ? 4 CommentairesGuyBriole, Psychanalyste membre de la ECF, psychiatre et ancien Directeur Ă l'hĂŽpital du Val-de-GrĂące Ă Paris, est intervenu dans l'Ă©mission "n'est pas fou qui veut" sur
wook deve saber QUANDO VOU RECEBER A MINHA ENCOMENDA? O envio da sua encomenda depende da disponibilidade dos artigos encomendados. Para saber o prazo que levarĂĄ a receber a sua encomenda, tenha em consideração » a disponibilidade mais elevada dos artigos que estĂĄ a encomendar » o prazo de entrega definido para o tipo de envio escolhido, e » a possibilidade de atrasos provocados por greves, tumultos e outros fatores fora do controle das empresas de transporte. EM STOCK Sendo a sua encomenda constituĂda apenas por produtos EM STOCK*, irĂĄ recebĂȘ-la dia Ăștil seguinte ao da encomenda, caso a confirmação do seu pagamento nos seja comunicada atĂ© Ă s 12h00 de um dia Ăștil e, no checkout, opte por selecionar o mĂ©todo de envio, pago, CTT EXPRESSO â 24H. Optando por outro mĂ©todo de envio, gratuito, a sua encomenda poderĂĄ ser-lhe entregue atĂ© dois dias Ășteis apĂłs a receção da confirmação do seu pagamento, se a mesma se verificar num dia Ăștil. * esta disponibilidade apenas Ă© garantida para uma unidade de cada produto e sempre sujeita ao stock existente no momento em que a confirmação do pagamento nos for comunicada. ENVIO ATĂ X DIAS Esta disponibilidade indica que o produto nĂŁo se encontra em stock e que demorarĂĄ x dias Ășteis a chegar do fornecedor. Estes produtos, especialmente as ediçÔes mais antigas, estĂŁo sujeitos Ă confirmação de preço e disponibilidade de stock no fornecedor. PRĂ-LANĂAMENTO Os produtos com esta disponibilidade tĂȘm entrega prevista a partir da data de lançamento. DISPONIBILIDADE IMEDIATA Tipo de disponibilidade associada a artigos digitais tais como eBooks, Audiolivros e cheques-prenda digitais, que sĂŁo disponibilizados de imediato, apĂłs o pagamento da encomenda. No caso dos eBooks e Audiolivros, a disponibilização ocorre na sua biblioteca. Para calcular o tempo de entrega de uma encomenda deverĂĄ somar Ă disponibilidade mais elevada dos artigos que estĂĄ a encomendar o tempo de entrega associado ao tipo de envio escolhido, salvo atrasos provocados por greves, tumultos e outros fatores fora do controle das empresas de transporte.
Nedevient pas fou qui veut : clinique psychanalytique des psychoses (BrochĂ©) achat en ligne au meilleur prix sur E.Leclerc. Retrait gratuit dans + de 700 magasins RĂ©sumĂ© Index Plan Texte Notes Citation Auteur RĂ©sumĂ©s La religion serait, aux yeux de la psychanalyse, une nĂ©vrose obsessionnelle. Les Ă©crits de Freud touchant Ă la religion, de Totem et tabou Ă LâAvenir dâune illusion, alimentent cette vulgate. On peut nĂ©anmoins sâinterroger sur le sort que Freud rĂ©serve, dans MoĂŻse et le monothĂ©isme, Ă ses coreligionnaires juifs persĂ©cutĂ©s par les nazis le testament » du fondateur de la psychanalyse Ă lâĂ©gard du judaĂŻsme est plus ouvert quâon ne croit. De plus, on ne sâest guĂšre avisĂ© du fait que la qualification de nĂ©vrose ne constitue en rien une dĂ©finition. Quand Freud cherche Ă donner quelque chose de tel, il sâappuie volontiers sur lâĂ©tymologie et sur les significations souvent contradictoires que celle-ci livre. La mĂȘme dĂ©marche peut ĂȘtre tentĂ©e Ă propos de la religion, qui nâest pas seulement rassemblement sous un principe mais aussi Ćuvre de lecture, comme lâillustre la promesse faite Ă Abraham, le pĂšre des religions du Livre. Viewed by psychoanalysis, religion should be an obsessive neurosis. Freudâs writings on religion, from Totem and Taboo » to The Future of an Illusion » sustain that common view. One may all the same question the place that Freud in Moses and Monotheism » gives to his fellow Jews per-secuted by the nazis the testament » of the founder of psychoanalysis concerning Judaism is more open-minded than is usually believed. Moreover little attention has been paid to the fact that calling religion a neurosis is by no means a definition. When Freud attempts to give something like a definition, he usually starts with the etymology and with the often contradictory meanings that science provides. The same approach may be tried about religion, which not only a gathering of people following the same principle, but also the practice of reading, as is illustrated by the promise made to Abraham, the father of the religions of the de page EntrĂ©es d'index Haut de page Texte intĂ©gral 1Quand on demande Ă quelquâun qui sâintĂ©resse Ă la psychanalyse ce quâil pense de la religion, il est courant de lâentendre Ă©voquer la nĂ©vrose, les foules conventionnelles et les liens libidinaux qui en assurent la cohĂ©sion. Quand on cherche ensuite Ă faire prĂ©ciser ce que reprĂ©sente le terme de nĂ©vrose, la rĂ©ponse est tout aussi rebattue. Elle en appelle Ă la maladie, voire Ă lâanomalie psychique. Et celles-ci renvoient Ă la compĂ©tence du psychanalyste, du coup promu officier de santĂ© mentale et rectificateur des errements du dĂ©sir. On trouve dans lâĆuvre de Freud les Ă©lĂ©ments qui nourrissent une telle vulgate. Cette version consacrĂ©e permet de sâen tenir aux idĂ©es reçues et dâignorer une recherche qui sâĂ©tend sur plus dâun demi-siĂšcle. Une rĂ©flexion rigoureuse portant sur la conception freudienne de la religion exige en revanche de lire le maĂźtre de prĂšs afin de dĂ©gager de ses Ă©crits les consĂ©quences quâils impliquent. 2Une telle exigence relĂšve de la morale Ă©lĂ©mentaire, Ă laquelle je souscris. Je dĂ©velopperai mon parcours en deux temps. AprĂšs avoir exposĂ© la façon dont Freud approche le fait religieux Ă partir de son expĂ©rience clinique et des apports de lâethnologie et de lâhistoire, je pointerai, dans le discours freudien, les remarques qui permettent dâintroduire la problĂ©matique de la lecture Ćuvrant dans la religion et dans la rĂ©flexion menĂ©e Ă son propos. I. La construction de Totem et tabou 1 S. Freud, Actes obsĂ©dants et exercices religieux », LâAvenir dâune illusion, Paris, PUF, 1971, p. ... 2 Ibid. 3 Ibid., 4 S. Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, Paris, Gallimard, coll. IdĂ©es », 1948, p. 76. 5 Freud, Actes obsĂ©dants et exercices religieux », p. 86. 6 Ibid., p. 90. 3DĂšs 1907, un Ă©crit intitulĂ© Actes obsĂ©dants et exercices religieux rĂ©vĂšle lâintĂ©rĂȘt portĂ© par Freud Ă la religion. Lâauteur ouvre son propos par cette phrase Je ne suis certes pas le premier quâait frappĂ© la ressemblance qui existe entre les actes obsĂ©dants des nĂ©vrosĂ©s et les exercices par lesquels le croyant tĂ©moigne de sa piĂ©tĂ©1 ». La suite de lâarticle multiplie les exemples qui montrent la ressemblance entre pensĂ©es, reprĂ©sentations ou impulsions obsĂ©dantes, caractĂ©ristiques de la nĂ©vrose obsessionnelle2 » et les actes sacrĂ©s du rite religieux3 ». Ă cette Ă©poque Freud reste modĂ©rĂ©. Il ne dĂ©clare pas encore que la religion nâest quâune nĂ©vrose de lâhumanitĂ©4 ». Il se contente de comparer la nĂ©vrose obsessionnelle Ă une caricature mi-comique, mi-lamentable dâune religion privĂ©e5 » qui demeure sous lâemprise dâun sentiment de culpabilitĂ© [lequel] prend sa source dans certains processus psychiques prĂ©coces6 ». 7 Ibid., p. 92. 8 Ibid., p. 93. 9 Ibid., p. 94. 4On retiendra ici lâinsistance du psychanalyste sur lâĂ©conomie du sentiment ou de lâaffect dont lâorigine nâest pas encore prĂ©cisĂ©e. Et quand il invoque lâangoisse expectante7 » du religieux craignant les chĂątiments divins, il se contente de souligner les concordances » et les analogies » qui lui permettent de concevoir la nĂ©vrose obsessionnelle comme constituant un pendant pathologique de la formation des religions8 ». Il qualifie ainsi la nĂ©vrose de religiositĂ© individuelle [et] la religion de nĂ©vrose obsessionnelle universelle9 ». On notera enfin, pour y revenir plus loin, que Freud se borne pour lâinstant Ă rĂ©coler et Ă dĂ©crire les actes et les pensĂ©es obsĂ©dants sans avancer de vĂ©ritable dĂ©finition qui rendrait compte de la nĂ©vrose obsessionnelle - et donc implicitement de la religion. Il lui faudra mener Ă bien lâentreprise dĂ©veloppĂ©e dans Totem et tabou pour asseoir dĂ©finitivement sa conception du religieux. Celle-ci, en effet, ne variera plus jusquâen 1939, annĂ©e de la publication intĂ©grale du MoĂŻse et le monothĂ©isme et de la disparition de lâinventeur de la psychanalyse. 10 S. Freud, Totem et tabou, Paris, Petite BibliothĂšque Payot, 1965, p. 162. 5Avec Totem et tabou, Freud ancre sa rĂ©flexion autour de la notion de tabou afin de justifier lâapport de la psychanalyse Ă lâethnologie et dâexpliquer lâuniversalitĂ© de lâinterdit de lâinceste. Cette notion lui permet de faire le lien entre lâarticle de 1907 et sa position dĂ©finitive de 1912 qui centre sa conception de la nĂ©vrose et de la religion autour de la problĂ©matique paternelle, elle-mĂȘme liĂ©e Ă la question du totem. La dĂ©monstration du psychanalyste suit un parcours rigoureux. On peut le rĂ©sumer de la façon suivante le tabou de lâinceste rapportĂ© par lâethnologie renvoie lui-mĂȘme Ă un interdit qui semble caractĂ©riser toutes les structures sociales observĂ©es. Pour faire concorder psychanalyse et ethnologie et ainsi garantir le sĂ©rieux de son hypothĂšse, Freud a recours aux thĂ©ories de Darwin et Ă la notion dâ un pĂšre violent, jaloux, gardant pour lui toutes les femelles et chassant ses fils Ă mesure quâils grandissent10 ». Ă partir de ce postulat darwinien, il Ă©labore, Ă la maniĂšre de Platon, un mythe explicatif. 11 Ibid.,p. 163. 12 Ibid. 6Ce mythe fait Ă©tat du meurtre dâun pĂšre primitif, corrĂ©latif de la premiĂšre organisation sociale et cause constitutive de la civilisation. Rappelons Ă ce titre ces pages cĂ©lĂšbres de lâouvrage Lâorganisation la plus primitive que nous connaissions et qui existe encore actuellement chez certaines tribus consiste en associations dâhommes jouissant de droits Ă©gaux et soumis aux limitations du systĂšme totĂ©mique, y compris lâhĂ©rĂ©ditĂ© en ligne maternelle. Cette organisation a-t-elle pu provenir de celle que postule lâhypothĂšse darwinienne ? et par quel moyen a-t-elle Ă©tĂ© obtenue ?11 » La rĂ©ponse est connue qui conte le meurtre du pĂšre, suivi de sa dĂ©voration, par des frĂšres rassemblĂ©s dans la haine Un jour, les frĂšres chassĂ©s se sont rĂ©unis, ont tuĂ© et mangĂ© le pĂšre, ce qui a mis fin Ă lâexistence de la horde paternelle. Une fois rĂ©unis, ils sont devenus entreprenants et ont pu rĂ©aliser ce que chacun dâeux, pris individuellement, aurait Ă©tĂ© incapable de faire12 ». La dĂ©voration rĂ©alise lâidentification au pĂšre sur le mode de lâincorporation orale. Elle permet ainsi Ă chacun de sâapproprier la force et le pouvoir paternels. 7Mais lâĂ©criture du mythe ne peut sâarrĂȘter lĂ sans faire Ă©tat de lâarticulation du dĂ©sir et de la loi qui, seule, permet de rendre compte de la survie dâune sociĂ©tĂ© de frĂšres, comme de la naissance de la civilisation et de la religion. Cette construction introduit donc, outre la notion dâambivalence, celle de culpabilitĂ© qui, ensemble, expliquent lâexaltation du pĂšre et sa divinisation par les frĂšres repentants 13 Ibid., p. 164. Il suffit, dit Freud, dâadmettre que la bande fraternelle, en Ă©tat de rĂ©bellion, Ă©tait animĂ©e Ă lâĂ©gard du pĂšre des sentiments contradictoires qui, dâaprĂšs ce que nous savons, forment le contenu ambivalent du complexe paternel chez chacun de nos enfants et de nos nĂ©vrosĂ©s. Ils haĂŻssaient le pĂšre [...], mais tout en le haĂŻssant, ils lâaimaient et lâadmiraient. AprĂšs lâavoir supprimĂ©, aprĂšs avoir assouvi leur haine et rĂ©alisĂ© leur identification avec lui, ils ont dĂ» se livrer Ă des manifestations affectives dâune tendresse exagĂ©rĂ©e. Ils le firent sous la forme du repentir [...]. Le mort devenait plus puissant quâil ne lâavait jamais Ă©tĂ© de son vivant13. 8Le pĂšre devint Dieu et la loi avec lui. La religion put dĂ©sormais exercer son empire avec lâaide de la morale... et du bras sĂ©culier quand cela fut possible. 9Pour rendre compte de lâarticulation de la loi et du dĂ©sir, Freud Ă©met une nouvelle hypothĂšse 14 Ibid., p. 165. Si les frĂšres Ă©taient associĂ©s, tant quâil sâagissait de supprimer le pĂšre, ils devenaient rivaux, dĂšs quâil sâagissait de sâemparer des femmes. Chacun aurait voulu, Ă lâexemple du pĂšre, les avoir toutes Ă lui, et la lutte gĂ©nĂ©rale qui en serait rĂ©sultĂ©e aurait amenĂ© la ruine de la sociĂ©tĂ©. [..] Aussi les frĂšres, sâils voulaient vivre ensemble, nâavaient-ils quâun seul parti Ă prendre aprĂšs avoir, peut-ĂȘtre, surmontĂ© de graves discordes, instituer lâinterdiction de lâinceste, par laquelle ils renonçaient tous Ă la possession des femmes convoitĂ©es, alors que câĂ©tait principalement pour sâassurer cette position quâils avaient tuĂ© le pĂšre14. 10La boucle est bouclĂ©e. Les sentiments obsĂ©dants et lâambivalence qui les caractĂ©rise se retrouvent dĂ©placĂ©s sur lâinterdit de lâinceste, incarnĂ© dans un tabou qui nâappelle ni raison ni conscience morale. Son dĂ©cret tombe du ciel oĂč rĂšgne un pĂšre divinisĂ©, tout puissant, prĂȘt Ă se venger de la moindre incartade de ses fils, mais aussi toujours disposĂ© Ă leur garantir une vie Ă©ternelle quand leurs vertus ont accumulĂ© les mĂ©rites suffisants pour amadouer le monstre sacrĂ©. 11La religion disposera dâun avenir radieux ; elle rĂšgnera sur un monde humain en proie au ressentiment et Ă lâobĂ©issance haineuse, tant que le mythe religieux gardera, au dĂ©triment de la science, son pouvoir de sĂ©duction. LâhumanitĂ© vivra Ă cĂŽtĂ© de la rĂ©alitĂ© et de la vĂ©ritĂ©. Victime de la passion, elle sera dirigĂ©e par des clercs qui ne connaissent que leur pouvoir et se moquent de la raison et de sa voix fragile. 15 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 49. 16 Ibid., p. 39. 17 Freud, Totem et tabou, p. 179. 12Alors se lĂšve lâhumaniste dĂ©cidĂ© Ă dĂ©fendre urbi et orbi les valeurs de la civilisation contre les illusions [des] doctrines religieuses15 ». Celles-ci vĂ©hiculent des idĂ©es qui se cristallisent en des dogmes » invĂ©rifiables par des preuves scientifiques. Ă ces dogmes qui sont tous des absurditĂ©s16 », Freud oppose une thĂ©orie fondĂ©e sur lâobservation clinique que tout thĂ©rapeute peut confirmer. Et pour en signifier lâorigine, il substitue aux mythes religieux un mythe scientifique qui sâinscrit dans le complexe dâĆdipe oĂč lâon trouve les commencements Ă la fois de la religion, de la morale, de la sociĂ©tĂ© et de lâart, et cela en pleine conformitĂ© avec les donnĂ©es de la psychanalyse qui voit dans ce complexe le noyau de toutes les nĂ©vroses, pour autant que nous ayons rĂ©ussi jusquâĂ prĂ©sent Ă pĂ©nĂ©trer leur nature17 ». 18 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 44. 13LâAvenir dâune illusion, publiĂ© quinze ans plus tard, ravive la querelle et dĂ©clenche, au moins parmi les responsables religieux, un nouvel Ă©moi et une polĂ©mique non moins vĂ©hĂ©mente. Lâopuscule de Freud nâa pourtant rien Ă voir avec une pasquinade voire avec un pamphlet. Lâauteur, sĂ©duit comme la plupart des savants de son temps par lâefficace de la science, cherche Ă remettre la religion Ă sa place. Câest une illusion, dĂ©clare-t-il, et ce qui caractĂ©rise lâillusion, câest dâĂȘtre dĂ©rivĂ©e des dĂ©sirs humains18 ». La religion diffĂšre de lâerreur en ce sens quâelle renonce Ă ĂȘtre confirmĂ©e par le rĂ©el, câest-Ă -dire par les moyens de la science qui fait appel Ă lâobservation et au raisonnement. 19 S. Freud , Malaise dans la civilisation », Revue française de psychanalyse, Paris, PUF, XXXIV, ja ... 14Le positivisme scientiste professĂ© par le Viennois ne sâaccompagne pourtant pas dâun optimisme bĂ©at. La psychanalyse pour laquelle il revendique la scientificitĂ© que lui refusera, plus tard, Karl Popper, lui aura en effet permis de mettre au jour les ressorts cachĂ©s de lâĂąme humaine vouĂ©e Ă lâagressivitĂ© Lâhomme est, en effet, tentĂ© de satisfaire son besoin dâagression aux dĂ©pens de son prochain, dâexploiter son travail sans dĂ©dommagement, de lâutiliser sexuellement sans son consentement, de sâapproprier ses biens, de lâhumilier, de lui infliger des souffrances, de le martyriser et de le tuer »19. ConfrontĂ© Ă la fĂ©rocitĂ© et Ă la dĂ©tresse de son semblable, Freud stigmatise dans lâAvenir dâune illusion puis, trois ans plus tard, dans Malaise dans la civilisation, lâimpuissance de la religion Ă offrir une quelconque amĂ©lioration de la condition humaine. La morale fondĂ©e sur la crainte peut Ă la rigueur brider le mal qui sommeille en chacun, mais elle demeure incapable de domestiquer ce loup toujours prĂȘt Ă tuer. En agitant ses origines divines, la morale fondĂ©e sur la religion peut aussi accomplir son Ćuvre de rĂ©pression sans changer pour autant la nature psychologique de celui que lâon civilise, autrement dit, quâon dresse. 20 Voir ibid., p. 77. 21 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 29. 22 Ibid.,p. 70. 23 Ibid., p. 77. 24 Ibid.,p. 78. 25 Freud, Malaise dans la civilisation », p. 79. 26 Ibid. 15La civilisation a quand mĂȘme du bon20. Elle permet de lutter contre les souffrances engendrĂ©es par la suprĂ©matie de la nature21 ». Elle humanise cette nature et transmet le patrimoine culturel amassĂ© de gĂ©nĂ©rations en gĂ©nĂ©rations. Elle garde les acquis de la raison. Et parmi ceux-ci, il y a la psychanalyse qui apprend Ă lâhomme Ă sâaccepter tel quâil est, rĂ©duit Ă ses propres forces [et tenu de] sâen servir comme il convient22 ». Les seules divinitĂ©s qui se partagent le panthĂ©on freudien sâappellent logos et anankĂš23. Et si celle-ci impose raison et nĂ©cessitĂ© venant de la rĂ©alitĂ© extĂ©rieure, celui-lĂ nâest peut-ĂȘtre pas trĂšs puissant24 », mais il prĂ©side au travail scientifique, lequel est susceptible de mieux tenir ses promesses que ne le fait la religion. Cela dit, Freud se garde bien dâĂ©mettre quelque avis dĂ©finitif sur la civilisation Pour diffĂ©rentes raisons, tout jugement de valeur sur la civilisation humaine est bien loin de ma pensĂ©e25 », parce que tous les jugements de valeur portĂ©s par les hommes leur sont indiscutablement inspirĂ©s par leur dĂ©sir de bonheur, et quâils constituent ainsi une tentative dâĂ©tayer dâarguments leurs illusions26 ». II. Le testament de MoĂŻse et le monothĂ©isme 27 D. Bakan, Freud et la mystique juive,Paris, Petite BibliothĂšque Payot, 1977, 119. 28 M. Schur, La Mort dans la vie de Freud, Paris, Gallimard, 1975, p. 555. 29 Bakan, Freud et la mystique juive, p. 119. 16On achĂšvera ce rappel de la conception freudienne de la religion en reprenant quelques pages de MoĂŻse et le monothĂ©isme. Cet ouvrage est curieux. Autant Totem et tabou se distingue par lâĂ©lĂ©gance et la puissance de sa construction, autant le dernier livre de Freud apparaĂźt comme un essai fait de piĂšces et de morceaux, dĂ©roulant une sĂ©rie dâhypothĂšses qui ne semblent pas manifester la rigueur chĂšre Ă son auteur. David Bakan avoue Ă ce propos que certains des disciples de Freud ont essayĂ© de le rejeter ; dâautres le considĂšrent comme une production de vieillard et suggĂšrent que la meilleure façon de respecter le gĂ©nie de Freud est dâignorer cette Ćuvre27 ». Une telle opinion ne tient pas compte, entre autres, du tĂ©moignage de Max Schur28. Le mĂ©decin de Freud reconnaĂźt les points faibles de la construction de son ami. Ainsi dĂ©nonce-t-il la notion de traces archaĂŻques hĂ©rĂ©ditaires auxquelles Freud fait appel pour justifier la transmission de lâexpĂ©rience collective au sujet. Il ne remet pas en question pour autant les hypothĂšses exĂ©gĂ©tiques douteuses qui Ă©maillent lâouvrage. Bakan Ă©voque, lui, lâhypothĂšse dâun livre Ă double sens29 » Ă©crit selon les procĂ©dĂ©s de la Kabbale dont Freud aurait subi lâinfluence par le biais de ses parents, marquĂ©s, lâun et lâautre, par la tradition hassidique. 30 Ibid.,p. 47. 17On nâexposera pas ici la thĂšse dĂ©veloppĂ©e par David Bakan autour du courant mystique qui aurait mis fin au pouvoir des seuls rabbins, et ouvert le judaĂŻsme Ă la modernitĂ© occidentale. On soulignera en revanche le propos de LĂ©o Strauss rapportĂ© par lâauteur, selon lequel il existerait dans la pensĂ©e juive une tradition forgĂ©e pendant lâĂ©preuve de la persĂ©cution, de sâexprimer par Ă©crit dâune façon voilĂ©e30 ». On sait que lâĂ©criture de MoĂŻse et le monothĂ©isme a pour toile de fond la persĂ©cution anti-juive dont lâhistoire reconnaĂźt le caractĂšre exclusif. 31 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 7. 32 Ibid. 33 Ibid., p. 94. 34 Ibid., p. 80. 18La premiĂšre phrase de lâessai donne sa dimension tragique Ă lâensemble de lâouvrage DĂ©possĂ©der un peuple de lâhomme quâil cĂ©lĂšbre comme le plus grand de ses fils est une tĂąche sans agrĂ©ment que lâon nâaccomplit pas dâun cĆur lĂ©ger31 ». La question se pose alors de savoir pourquoi Ă©crire un livre qui fait mal et qui dĂ©possĂšde ses compatriotes dâun hĂ©ros tutĂ©laire. La phrase qui suit donne la rĂ©ponse Toutefois aucune considĂ©ration ne saurait mâinduire Ă nĂ©gliger la vĂ©ritĂ© au nom dâun prĂ©tendu intĂ©rĂȘt national32 ». La vĂ©ritĂ© est donc lâenjeu de lâentreprise. Lâ idĂ©al de vĂ©ritĂ© objective des hisÂtoriens33 » doit prĂ©sider Ă une dĂ©marche qui sâoppose au nationalisme. Et Freud connaĂźt parfaitement lâintĂ©rĂȘt national des nazis et lâantisĂ©mitisme fou de lâauteur de Mein Kampf. La vĂ©ritĂ© est donc liĂ©e au rĂ©el, câest-Ă -dire Ă lâĂ©criture de lâhistoire. Mais Freud sait aussi que le rĂ©el est toujours dĂ©jĂ interprĂ©tĂ©, et que la lecture interprĂ©tante est celle dâun sujet, lui-mĂȘme touchĂ© par ce rĂ©el. Car, selon lui, les phĂ©nomĂšnes psychiques tirent leur caractĂšre obsĂ©dant [de] la part de vĂ©ritĂ© historique quâils contiennent34 ». Le travail du psychanalyste consiste donc Ă jeter un pont entre lâĂ©coute clinique et le rĂ©el de lâĂ©vĂ©nement historique. Câest pourquoi Freud ne renoncera jamais vraiment Ă lâopinion qui dĂ©fend lâhĂ©rĂ©ditĂ© des caractĂšres acquis. 35 Ibid., p. 144 s. 36 Ibid., p. 116. 37 Ibid.,p. 117. 38 Ibid. 39 Ibid.,p. 119. 40 Ibid., p. 120. 19Quel que soit le caractĂšre kabbalistique confĂ©rĂ© Ă lâouvrage, on retiendra que son auteur, comme il lâaffirme, ne retire rien de ce quâil a avancĂ© dans Totem et tabou. Et pourtant il opĂšre un glissement qui dĂ©place le rĂŽle du pĂšre sur le fils. Ce nâest plus un PĂšre-Dieu qui est tuĂ©, mais MoĂŻse, lieutenant du PĂšre. En tant que grand frĂšre, le Grand Homme, crĂ©ateur des juifs35, suscite la haine de la fratrie. Il sera assassinĂ©, non sans avoir rĂ©alisĂ© son Ćuvre de lĂ©gislateur et imposĂ© le monothĂ©isme du pharaon hĂ©rĂ©tique Akhenaton. Freud interprĂšte lâinstauration du monothĂ©isme comme le retour de la religion du pĂšre primitif36 ». AprĂšs une pĂ©riode de latence indĂ©finie, un juif romain, Paul de Tarse, sâempare du sentiment de culpabilitĂ© fourrĂ© dans lâinconscient juif et le ramĂšne trĂšs justement Ă sa source prĂ©historique, en lui donnant le nom de pĂ©chĂ© originel un crime avait Ă©tĂ© commis envers Dieu et la mort seule pouvait le racheter37 ». Poussant plus loin, Freud affirme Toutefois, il ne fut nullement question de ce meurtre, mais seulement du fantasme de son expiation, et câest pourquoi ce fantasme put ĂȘtre saluĂ© comme un message de dĂ©livrance Ăvangile. Un fils de Dieu, innocent de toute faute, sâĂ©tait sacrifiĂ©, avait pris Ă son compte la culpabilitĂ© de tous. Il fallait bien que ce fĂ»t un fils, puisque le meurtre avait eu un pĂšre pour victime38 ». Et le psychanalyste conclut Le judaĂŻsme avait Ă©tĂ© la religion du pĂšre, le christianisme devint la religion du fils. Lâancien Dieu, le Dieu-pĂšre, passa au second plan ; le Christ, son fils, prit sa place, comme aurait voulu le faire, Ă une Ă©poque rĂ©volue, chacun des fils rĂ©voltĂ©s. Paul, le continuateur du judaĂŻsme, fut aussi son destructeur39 ». MoĂŻse assassinĂ© avait Ă©tĂ© le substitut du pĂšre40 » et le Christ, substitut de MoĂŻse, rĂ©alise, selon Paul, le judaĂŻsme, en faisant du Dieu national protecteur exclusif de son peuple Ă©lu, un Dieu universel sans image, sans matĂ©rialitĂ© et sans choix prĂ©fĂ©rentiel. 41 Schur, La Mort dans la vie de Freud, p. 554. 42 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 77. 43 Ibid.,p. 75. 44 Bakan, Freud et la mystique juive, p. 61. 20On comprend que ce dĂ©piautage du judaĂŻsme, puis du christianisme, ne soit pas du goĂ»t de tout le monde. Que MoĂŻse soit considĂ©rĂ© comme un goy cynique, utilisant la condition prĂ©caire des juifs en Ăgypte pour rĂ©cupĂ©rer un pouvoir perdu avec le retour dâAmon, ne peut quâenfermer dans le dĂ©sespoir leurs descendants persĂ©cutĂ©s par les nazis. Freud se doute bien que la publication de son essai pourrait aussi affecter les relations avec une Ăglise catholique omniprĂ©sente. Il sait que lâinfluence dâun certain PĂšre Schmidt sur la hiĂ©rarchie pourrait entraĂźner des reprĂ©sailles41 allant jusquâĂ interdire lâexercice de la psychanalyse42 » en Autriche. Pourquoi alors, aprĂšs beaucoup dâhĂ©sitations, dĂ©cide-t-il de publier la partie conclusive de lâouvrage ? Parce quâil est mĂ», dit-il, par lâaudace de celui qui nâa plus grand-chose ou plus rien du tout Ă perdre43 ». La rĂ©ponse semble rapide de la part dâun savant qui a toujours revendiquĂ© sa judaĂŻtĂ© » et qui passa toute sa vie [...] dans un monde composĂ© presque exclusivement de Juifs44 ». Nâayant plus rien Ă perdre, se dĂ©solidariserait-il de ses compatriotes ? On suggĂšrera une rĂ©ponse plus loin. 45 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 75. 46 Ibid.,p. 76. 47 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 149-150. 48 Ibid.,p. 151. 49 Ibid.,p. 152. 50 Ibid. 51 Ibid., p. 154. 21Cela dit, une nouvelle question surgit bientĂŽt autour de lâidĂ©e de sublimation. Le psychanalyste Ă©voque dĂ©jĂ dans VAvenir dâune illusion le devenir pulsionnel et la possible Ă©puration » de la religion. Ă un contradicteur virtuel45 qui avance cet argument, il rĂ©pond quâil nây est pas insensible tout en affirmant que les illusions religieuses [demeurent] impossibles Ă corriger46 », car elles possĂšdent un caractĂšre dĂ©lirant. Dans MoĂŻse et le monothĂ©isme, pourtant, il admet chez les juifs certaines dispositions psychiques [aidant] Ă supporter les inconvĂ©nients de la religion mosaĂŻque dans le seul dessein dâĂȘtre le peuple Ă©lu de Dieu47 ». Et quelles sont les consĂ©quences de cette religion ? Freud en note trois. La premiĂšre est dâavoir donnĂ© aux Juifs une idĂ©e plus grandiose de la divinitĂ©48 ». La seconde consiste Ă interdire de se faire une image de Dieu49 », en dâautres termes, Ă mettre Ă lâarriĂšre-plan [...] la perception sensorielle par rapport Ă lâidĂ©e abstraite50 ». La troisiĂšme a trait Ă la reconnaissance de lâexistence de forces âspirituellesâ, câest-Ă -dire de forces que les sens, et singuliĂšrement la vue, ne peuvent saisir51 ». 22Ces trois consĂ©quences lui permettent dâamener une conclusion qui ne semble pas avoir Ă©tĂ© exploitĂ©e par les anthropologues, les thĂ©ologiens ou les moralistes soucieux dâarticuler la doctrine psychanalytique et la thĂ©ologie, eu Ă©gard aux rapports de la fonction paternelle avec lâĂcriture. Voici la conclusion de Freud 52 Ibid., p. 154-155. Nous savons que MoĂŻse inculqua aux Juifs la fiertĂ© de se croire un peuple Ă©lu ; grĂące Ă la dĂ©matĂ©rialisation de Dieu, un nouveau joyau sâajouta encore au trĂ©sor secret de ce peuple. Les Juifs continuĂšrent Ă sâintĂ©resser aux choses spirituelles, les malheurs politiques de leur nation leur apprirent Ă apprĂ©cier Ă sa juste valeur le seul bien qui leur restĂąt leurs documents Ă©crits. ImmĂ©diatement aprĂšs la destruction par Titus du temple de JĂ©rusalem, le rabbin Jochanaan ben Sakkai demanda lâautorisation dâouvrir Ă JahnĂ© la premiĂšre Ă©cole consacrĂ©e Ă lâĂ©tude de la Thora. DĂ©sormais ce furent les Livres SacrĂ©s et leur Ă©tude qui empĂȘchĂšrent ce peuple dispersĂ© de se dĂ©sagrĂ©ger52. 53 K. Stern, La TroisiĂšme RĂ©volution. Essai sur la psychanalyse et la religion, Paris, Ăd. du Seuil, 1 ... 54 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 76. Nous soulignons. 55 Freud, Actes obsĂ©dants et exercices religieux », p. 83. 56 Voir GOUX, Les Iconoclastes, Paris, Ăd. du Seuil, 1978. 23Une telle affirmation modifie lâabord de la question religieuse pratiquĂ© aprĂšs Freud. Karl Stern53 dĂ©nonce Ă ce propos le rĂ©ductionnisme de la formule ne que » employĂ©e par les disciples, mais que lâon trouve dĂ©jĂ , on lâa soulignĂ©, sous la plume du maĂźtre de Vienne Nos recherches nous amĂšnent Ă conclure que la religion nâest quâune nĂ©vrose de lâhumanitĂ©54 ». RĂ©duire la religion Ă un certain nombre de phĂ©nomĂšnes psychiques morbides55 », qui tiennent lieu de dĂ©finition, semble rĂ©vĂ©ler une hĂąte qui ne relĂšve pas de la neutralitĂ© propre Ă la mĂ©thode scientifique. On peut dĂšs lors se poser la question des raisons qui ont poussĂ© Freud Ă pourchasser la religion et Ă en dĂ©noncer, trente ans durant, le caractĂšre nĂ©vrotique. Le souci de vĂ©ritĂ© en est une, qui vitupĂšre le mensonge millĂ©naire colportĂ© par les clercs. LâantisĂ©mitisme ambiant en est certainement une autre, lequel voit la trĂšs catholique Autriche sĂ©duite par les pompes hitlĂ©riennes. Une exigence morale sans concession apparaĂźt, elle aussi, comme une des raisons permettant dâinvoquer la rigueur scientifique, faute de pouvoir dĂ©montrer lâexactitude de la doctrine. Toutes ces raisons ont Ă©tĂ© invoquĂ©es pour expliquer le radicalisme de Freud, sans compter celle qui consiste Ă dĂ©noncer les rapports nĂ©vrotiques du psychanalyse avec son pĂšre Jakob. Bakan, enfin, propose une interprĂ©tation reprise par Jean-Joseph Goux56 selon laquelle Freud aurait voulu protĂ©ger les siens de la rivalitĂ© mortifĂšre des nazis en faisant du peuple allemand le dĂ©positaire dâune Ă©lection usurpĂ©e par les juifs Ă la suite de MoĂŻse. Cette interprĂ©tation pourrait rĂ©pondre Ă la question posĂ©e plus haut Ă propos de la solidaritĂ© de Freud avec le destin du peuple juif. 24Il reste cependant Ă dĂ©velopper une problĂ©matique qui a trait Ă la dĂ©finition mĂȘme de la religion et au ne que » qui lâaccompagne. Il est quand mĂȘme curieux que la plupart des psychanalystes qui ont suivi Freud nâaient pas cherchĂ© du cĂŽtĂ© de lâĂ©tymologie pour dĂ©finir le mot religion ». InstallĂ© dans les catĂ©gories du mĂ©dical ou du mĂ©dicinal, Freud lui-mĂȘme reste fixĂ© Ă une construction Ă©laborĂ©e une fois pour toutes dans Totem et tabou. Il offre pourtant au lecteur de MoĂŻse et le monothĂ©isme la possibilitĂ© de dĂ©velopper une autre intelligence de la religion. Celle-ci introduit la problĂ©matique de la lecture et de lâĂ©criture en lien avec la fonction paternelle. Cette possibilitĂ© vaut la peine dâĂȘtre ici dĂ©veloppĂ©e. III. La promesse de la lettre 57 S. Freud, Essai de psychanalyse appliquĂ©e, Paris, Gallimard, coll. IdĂ©es »,1933, p. 174. 25Quand Freud cherche Ă Ă©tablir avec exactitude la signification dâun mot dĂ©signant un concept, il ne manque pas de chercher Ă cerner lâĂ©tymon de ce terme. La dĂ©finition de das Unheimliche en français lâinquiĂ©tante Ă©trangetĂ© est Ă cet Ă©gard exemplaire. LâenquĂȘte quâil mĂšne se conclut par cette phrase Ainsi âheimlichâ est un mot dont le sens se dĂ©veloppe vers une ambivalence, jusquâĂ ce quâenfin il se rencontre avec son contraire âunheimlichâ57 ». Il ne semble pas avoir cherchĂ© Ă faire le mĂȘme parcours pour le mot religion » Religion en allemand. Le recours Ă lâĂ©tymologie lui aurait pourtant offert, au mot religion », une signification ne relevant pas de la seule psychopathologie. Le Dictionnaire historique de la langue française reprend les deux significations attribuĂ©es au latin religio pour affirmer que lâĂ©tymologie est controversĂ©e depuis lâAntiquitĂ© 58 A. Rey dir., Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1992 ... Ă la suite de Lactance, de Tertullien, les auteurs chrĂ©tiens se plaisent Ă rattacher religio au verbe religare relier », de re [...] Ă valeur intensive et de ligare lier ». La religion ayant pour objet les relations que lâon entretient avec la divinitĂ© [...]. Une autre origine est signalĂ©e par CicĂ©ron et appuyĂ©e de son autoritĂ© religio serait tirĂ© soit de legere cueillir, ramasser » » lire avec adjonction dâun prĂ©fixe re [...] marquant lâintensitĂ© ou le retour en arriĂšre, soit de religere, recueillir, recollecter »58. 26Lâarticulation des deux Ă©tymologies illustre avec bonheur la conclusion de Freud qui insiste sur la spiritualisation du judaĂŻsme opĂ©rĂ©e par MoĂŻse. La destruction du Temple et la dĂ©matĂ©rialisation de Dieu concourent Ă purifier le culte et les pratiques de la religion juive. Si, en effet, les seuls biens restĂ©s aux juifs, aprĂšs la destruction du Temple, furent leurs documents Ă©crits et si lâĂ©tude des Livres SacrĂ©s fut la seule pratique qui empĂȘcha le peuple dispersĂ© de se dĂ©sagrĂ©ger, il faut bien admettre que lâarticulation des deux dĂ©finitions latines du mot religio convient au judaĂŻsme en tant que religion dite du Livre. 59 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 125. 60 Ibid. 61 Ibid. 27Elle devrait donc convenir Ă©galement au christianisme et Ă lâislam. Pour celui-ci, Freud avoue un savoir limitĂ©, lequel lui permet toutefois [dâaffirmer] que lâinstauration de la religion de Mahomet lui paraĂźt ĂȘtre une rĂ©pĂ©tition abrĂ©gĂ©e de la religion juive sur laquelle elle sâest modelĂ©e59 ». Cela signifie que lâislam rĂ©cupĂ©ra dans le judaĂŻsme la figure du grand et unique PĂšre primitif60 ». Mais quâAllah, en retour, se montra bien plus reconnaissant envers son peuple Ă©lu que ne lâavait Ă©tĂ© JahvĂ© envers le sien61 ». On a Ă©voquĂ© plus haut ce que dit Freud de la religion chrĂ©tienne fondĂ©e par Paul. Cela Ă©tant, il faut reconnaĂźtre que des trois religions du Livre, seul le judaĂŻsme mĂ©rite vraiment ce qualificatif. Lâislam et, jusquâĂ une date rĂ©cente, le catholicisme, eurent tendance Ă se rĂ©clamer dâune tradition accrochĂ©e au sens reçu et rĂ©tive Ă tout renouvellement apportĂ© par la relecture. La rĂ©citation du Coran ou des Ăvangiles ne permet pas en effet de revendiquer un brevet de lecture. Cette affirmation introduit dĂšs lors la question de la lecture. 28Quâest-ce que lire ? LâĂ©tymologie reste imprĂ©cise. On choisira la dĂ©finition partagĂ©e par la majoritĂ© des dictionnaires. Celle-ci renvoie lire Ă legere cueillir, colliger, lier, Ă©lire ». Au XVIe siĂšcle, le français lire prend le sens de discerner », puis de comprendre » le sens de certains signes. La comprĂ©hension est elle-mĂȘme le rĂ©sultat du dĂ©chiffrage des lettres, ces derniĂšres Ă©tant le rĂ©sultat produit par lâĂ©criture, laquelle signifie dâabord inciser, couper ». 62 Voir R. Sublon, LâĂthique ou la Question du sujet, Metz-Strasbourg, Ăditions du Portique, 2004, p. ... 29LâĂ©tymologie de ces deux verbes annonce avec justesse la structure caractĂ©ristique de la lettre. Une telle structure est dite moebienne en ce sens que la coupure longitudinale du ruban de Moebius rĂ©vĂšle la particularitĂ© dâarticuler lâidentique et le diffĂ©rent62. On dira donc que le dĂ©chiffrage se confronte Ă une structure de coupure oĂč Y un sâarticule Ă lâautre, câest-Ă -dire nâest pas sans lui, comme Freud le constate, lui aussi, Ă propos de V Unheimliche. Ces remarques permettent dâavancer que la lettre, en tant que condition de la lecture, est grosse dâun double effet un effet de sens en mĂȘme temps quâun effet de suspens. En dâautres termes, le tracement de la lettre garde une ouverture. Elle interdit toute clĂŽture sur une signification ultime, qui dirait le vrai sur le vrai. Elle mĂ©nage donc la possibilitĂ© de relire. 30Freud nâa pas pris la peine de dĂ©finir la religion. Il a pourtant perçu quâelle pouvait ĂȘtre une lecture - Ă preuve celle quâil fait du judaĂŻsme. On la poursuivra ici, Ă titre dâillustration, en remontant toutefois, par-delĂ MoĂŻse, au mythe dâAbraham, le pĂšre des croyants, commun aux trois religions du Livre. Ce mythe comporte, on le sait, la perspective dâun meurtre dont le fils est lâobjet, et le pĂšre, lâacteur. On peut interprĂ©ter lâĂ©pisode en imaginant quâAbraham prend ses prĂ©cautions pour Ă©viter le sort rĂ©servĂ© au pĂšre primordial. Cette anecdote nâa pas manquĂ© de susciter des commentaires variĂ©s qui, dâOrigĂšne Ă Kierkegaard, Ă©maillent la thĂ©ologie chrĂ©tienne. La plupart des exĂ©gĂštes rĂ©duisent cet Ă©pisode Ă un conflit psychologique, voire moral, et offrent des solutions tout aussi psychologiques ou morales qui consistent Ă cĂ©lĂ©brer le renoncement Ă la violence de la pulsion de mort ou Ă exalter la spiritualisation possible de la religion. 63 J. Lacan, Des Noms-du-PĂšre, Paris, Ăd. du Seuil, 2005, p. 87. 64 J. Lacan, Le SĂ©minaire. Lâidentification, inĂ©dit, sĂ©ance du 65 Ibid. 31Une telle lecture qui consiste Ă se fier Ă la purification des ĂȘtres et des idĂ©es ne semble pas, en thĂ©orie au moins, garantir la promesse faite par la divinitĂ© Ă Abraham dâune immense descendance. Une autre lecture de lâAkeda, câest-Ă -dire de la ligature dâIsaac, est possible. Elle en appelle Ă une nĂ©cessitĂ© logique susceptible dâassurer une issue au drame qui se noue. Cette lecture met en scĂšne la fonction du nom propre et le caractĂšre essentiel de ce dernier dâĂȘtre dĂ©pourvu de sens. Le sĂ©minaire consacrĂ© par Lacan Ă VIdentification 1961-1962, puis Y Introduction aux Noms-du-PĂšre 1963, lui permettent de situer la fonction du nom propre en tant quâil est une marque dĂ©jĂ ouverte Ă la lecture63 ». En choisissant Gardiner contre Russel, lequel ignore la fonction de la lettre dans le nom propre, Lacan souligne dâabord lâinfluence de John Stuart Mill 1806-1876 et du grammairien grec du IIe siĂšcle avant Dionysus Thrax, sur Gardiner. Pour le psychanalyste, Mill voit juste en ce quâil distingue le nom propre du nom commun en recourant au sens Si quelque chose est un nom propre, câest pour autant que ça nâest pas le sens de lâobjet quâil amĂšne avec lui, mais quelque chose qui est de lâordre dâune marque appliquĂ©e en quelque sorte sur lâobjet ». Lacan poursuit Je pose quâil ne peut y avoir de dĂ©finition du nom propre que dans la mesure oĂč nous apercevrons le rapport de lâĂ©mission nommante avec quelque chose qui, dans sa nature radicale, est de lâordre de la lettre64 ». Et pour finir il constate que, le figuratif effacĂ©, ce qui reste câest quelque chose [du] trait unaire en tant quâil fonctionne comme distinctif, quâil peut Ă lâoccasion jouer le rĂŽle de marque65 ». 32Cette sĂ©rie dâaffirmations permet dâidentifier lettre, trait unaire et marque ouverte Ă la lecture. La lettre attend la lecture et câest Ă ce niveau que se situe, pour finir, le Nom par excellence, le Shem, imprononçable en tant que tel, et qui sâouvre sur une bĂ©ance au lieu de lâAutre. Cela Ă©tant, la relecture du mythe dâAbraham permet de pointer, en dehors du pathos ou du moralisme des interprĂ©tations habituelles, la condition de lâalliance, de la promesse et de la fĂ©conditĂ© dite spirituelle dâune religion qui serait du Livre. 66 Saint-Arnaud, La grĂące du âtroisiĂšme jourâ », Revue des Sciences Religieuses, 75 2001, p. ... 33RĂ©sumons Ă grands traits le mythe qui met en scĂšne lâĂ©mission nommante » de la divinitĂ©, Ă©mission qui transporte quelque chose de la lettre. El Shaddai qui se nomme et promet lâalliance renomme Abram en ajoutant un hĂ© Ă son nom. Abram devient Abraham. Puis est promulguĂ©e la condition de lâalliance tout mĂąle sera circoncis. La circoncision sera dĂ©sormais signe de la coupure dâune alliance. De son cĂŽtĂ©, lâĂ©pouse du patriarche est renommĂ©e Ă son tour. Elle ne sâappellera plus SaraĂŻ, mais Sarah avec hĂ©, car elle aussi reçoit le trait de la marque, trait identique Ă celui quâa reçu Abraham. Lâalliance se rĂ©vĂšle ainsi au lieu du redoublement de la marque, lĂ oĂč sâĂ©crit dans le nom et sur le sexe la diffĂ©rence qui constitue sa condition mĂȘme de possibilitĂ©. Cette diffĂ©rence repose sur ce fait, rappelĂ© par Guy-Robert Saint-Arnaud, que la marque ne peut devenir marque dâune diffĂ©rence que de la seule qualitĂ© de nâĂȘtre pas lâautre marque. Ce nâest pas la non-identitĂ© dâun trait Ă son voisin qui fait sa diffĂ©rence, mais le seul fait quâil nĂ©cessite dâĂȘtre Ă la fois deux et un pour nâĂȘtre pas le trait dâĂ cĂŽtĂ©66 ». 67 Lacan, Des Noms-du-PĂšre, p. 70. 34Si on rĂ©duit lâidentitĂ© du sujet Ă son statut social, on ne retiendra dâAbraham et de Sarah que le sens attachĂ© Ă leur nom propre, ou bien la symbolique qui les fait pĂšre et mĂšre, patriarche et matriarche, mais encore frĂšre et sĆur, car issus lâun et lâautre du mĂȘme pĂšre. On pourra dĂšs lors gloser, thĂ©ologiser ou moraliser autour dâun inceste originaire comme on lâa fait pour la descendance dâAdam et Ăve. En revanche, si on veut signifier un sujet qui se fonde et se dĂ©termine dans un effet du signifiant67 », une lettre est nĂ©cessaire et suffisante en tant quâelle fonctionne comme trait marqueur. Cette lettre disqualifie lâentreprise qui cherche Ă rĂ©aliser le symbolique de lâimaginaire, caractĂ©ristique, selon Lacan, de la religion. OpposĂ©e Ă cette entreprise, le travail de la psychanalyse consiste Ă imaginer le rĂ©el du symbolique et Ă renoncer Ă lâillusion quâun tel travail pourrait aboutir Ă sa fin grĂące Ă la rĂ©cupĂ©ration du reste quâil produit. 68 R. Heyer, Sacrifier la promesse ? », Revue des Sciences Religieuses, 79 2005, p. 413. 35Le dĂ©tour par la re-nomination dâAbram et de SaraĂŻ justifie ainsi une autre lecture de la religion, celle-ci Ă©tant liĂ©e Ă la promesse. Partant de lâAkeda, RenĂ© Heyer, confrontĂ© Ă ce problĂšme, constate que la promesse bute sur la finitude oĂč Ă©choue toute promesse rĂ©alisĂ©e. Ainsi ce fils tard venu, Isaac, qui tombe comme tous les fils sous le coup de la mortalitĂ©. Que vaut en effet une promesse si ce que lâon en obtient se perd dĂšs que reçu ? Il faut donc quâĂ travers la promesse accordĂ©e se maintienne son ouverture de promesse68 ». 36Quelle meilleure façon peut-on alors imaginer pour garder cette ouverture que celle dâassurer la possibilitĂ© de la lecture que la lettre conditionne ? Son trait est Ă©crit dans le nom et dans la coupure de lâAlliance. Il est tracĂ© sur lâorgane de la gĂ©nĂ©ration. Celui-ci nâest plus tout. SaraĂŻ, de son cĂŽtĂ©, a perdu le yod de lâorigine. La lettre inscrite dans la chair et dans le nom invite tout lecteur possible Ă y lire la passe de lâaffiliation. Celle-ci consiste Ă assentir Ă lâimpossible saisie dâune origine pour relire la trace dâune coupure. 69 Freud, Totem et tabou, p. 185. 70 Goethes Werke, MĂŒnchen, Droemersche Verlag Anstalt, 1953,I, p. 746. Jean Malaplate le traduit D ... 71 Goethe, Faust I et II, p. 63. 37Lâorigine est barrĂ©e. Freud, pourtant, achĂšve Totem et tabou sur une citation au commencement Ă©tait lâaction69 ». Ă quoi cette citation renvoie-t-elle ? Au dilemme faustien, bien sĂ»r. ConfrontĂ© Ă la lecture du premier verset de lâĂvangile selon saint Jean, Goethe y voit un texte fondateur Im Anfang war das Wort !70 ». Mais quoi ? Le mot Ă©crit-il le destin ? Le nom emporte-t-il la chose ? Et si câĂ©tait le Sens qui primait sur le reste ? Serait-ce alors le Sens qui crĂ©e et qui fait vivre ? Et si câĂ©tait la Force ?... Il faut aller plus loin ; lâEsprit meut lâintuition qui permet de tracer Dans le commencement existait lâAction71 ». 72 Freud, Totem et tabou, p. 185. 38Freud a lu ce passage du poĂšte. Comme lui, il pose dans le commencement lâacte. Ce choix est la coupure qui achĂšve son parcours en lâouvrant sur lâĂ©thique. Celle-ci exige que le choix soit possible das Wort ou die Tat ? Car lâun nâest pas sans lâautre. Le choix impliquant une perte, Freud conclut Sans prĂ©tendre clore la discussion [..] par une dĂ©cision dĂ©finitive et absolue, nous pouvons risquer cette proposition âau commencement Ă©tait lâactionâ72 »... Dans le commencement le tracement de la lettre mĂ©nageait le possible. Haut de page Notes 1 S. Freud, Actes obsĂ©dants et exercices religieux », LâAvenir dâune illusion, Paris, PUF, 1971, p. 83. 2 Ibid. 3 Ibid., 4 S. Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, Paris, Gallimard, coll. IdĂ©es », 1948, p. 76. 5 Freud, Actes obsĂ©dants et exercices religieux », p. 86. 6 Ibid., p. 90. 7 Ibid., p. 92. 8 Ibid., p. 93. 9 Ibid., p. 94. 10 S. Freud, Totem et tabou, Paris, Petite BibliothĂšque Payot, 1965, p. 162. 11 Ibid.,p. 163. 12 Ibid. 13 Ibid., p. 164. 14 Ibid., p. 165. 15 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 49. 16 Ibid., p. 39. 17 Freud, Totem et tabou, p. 179. 18 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 44. 19 S. Freud , Malaise dans la civilisation », Revue française de psychanalyse, Paris, PUF, XXXIV, janvier 1970, p. 50. 20 Voir ibid., p. 77. 21 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 29. 22 Ibid.,p. 70. 23 Ibid., p. 77. 24 Ibid.,p. 78. 25 Freud, Malaise dans la civilisation », p. 79. 26 Ibid. 27 D. Bakan, Freud et la mystique juive,Paris, Petite BibliothĂšque Payot, 1977, 119. 28 M. Schur, La Mort dans la vie de Freud, Paris, Gallimard, 1975, p. 555. 29 Bakan, Freud et la mystique juive, p. 119. 30 Ibid.,p. 47. 31 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 7. 32 Ibid. 33 Ibid., p. 94. 34 Ibid., p. 80. 35 Ibid., p. 144 s. 36 Ibid., p. 116. 37 Ibid.,p. 117. 38 Ibid. 39 Ibid.,p. 119. 40 Ibid., p. 120. 41 Schur, La Mort dans la vie de Freud, p. 554. 42 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 77. 43 Ibid.,p. 75. 44 Bakan, Freud et la mystique juive, p. 61. 45 Freud, LâAvenir dâune illusion, p. 75. 46 Ibid.,p. 76. 47 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 149-150. 48 Ibid.,p. 151. 49 Ibid.,p. 152. 50 Ibid. 51 Ibid., p. 154. 52 Ibid., p. 154-155. 53 K. Stern, La TroisiĂšme RĂ©volution. Essai sur la psychanalyse et la religion, Paris, Ăd. du Seuil, 1969, p. 103 et 111. 54 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 76. Nous soulignons. 55 Freud, Actes obsĂ©dants et exercices religieux », p. 83. 56 Voir GOUX, Les Iconoclastes, Paris, Ăd. du Seuil, 1978. 57 S. Freud, Essai de psychanalyse appliquĂ©e, Paris, Gallimard, coll. IdĂ©es »,1933, p. 174. 58 A. Rey dir., Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1992, article Religion », p. 1758. 59 Freud, MoĂŻse et le monothĂ©isme, p. 125. 60 Ibid. 61 Ibid. 62 Voir R. Sublon, LâĂthique ou la Question du sujet, Metz-Strasbourg, Ăditions du Portique, 2004, p. 79-80. 63 J. Lacan, Des Noms-du-PĂšre, Paris, Ăd. du Seuil, 2005, p. 87. 64 J. Lacan, Le SĂ©minaire. Lâidentification, inĂ©dit, sĂ©ance du 65 Ibid. 66 Saint-Arnaud, La grĂące du âtroisiĂšme jourâ », Revue des Sciences Religieuses, 75 2001, p. 351. 67 Lacan, Des Noms-du-PĂšre, p. 70. 68 R. Heyer, Sacrifier la promesse ? », Revue des Sciences Religieuses, 79 2005, p. 413. 69 Freud, Totem et tabou, p. 185. 70 Goethes Werke, MĂŒnchen, Droemersche Verlag Anstalt, 1953,I, p. 746. Jean Malaplate le traduit Dans le commencement Ă©tait le Verbe » Goethe, Faust I et II, trad. J. Malaplate, Paris, GF-Flammarion, 1984, p. 63. On pourra aussi se rĂ©fĂ©rer Ă la traduction de GĂ©rard de Nerval, dans Goethe, Faust, Paris, GF-Flammarion, 1964, p. 67 Au commencement Ă©tait le verbe ! ». 71 Goethe, Faust I et II, p. 63. 72 Freud, Totem et tabou, p. de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier Roland Sublon, Freud et la religion ou le choix du commencement », Revue des sciences religieuses, 82/1 2008, 65-79. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique Roland Sublon, Freud et la religion ou le choix du commencement », Revue des sciences religieuses [En ligne], 82/1 2008, mis en ligne le 10 octobre 2012, consultĂ© le 28 aoĂ»t 2022. URL ; DOI de page Auteur Roland Sublon FacultĂ© de thĂ©ologie catholique UniversitĂ© Marc Bloch StrasbourgHaut de page Droits d'auteur Tous droits rĂ©servĂ©sHaut de pageCepoint oĂč le langage s'Ă©puise. Jacques Lacan est mort le 9 septembre 1981, il avait 80 ans, des problĂšmes neurologiques l'empĂȘchaient alors de parler. Il s'en est allĂ© vers ce rĂ©eldonc, cet impossible Ă dire, comme si son corps, en l'amputant de la parole, en avait compris, lui, quelque chose. Notre psychanalyste : Lilia MahjoubJ. Lacan, en 1955-1956, dĂ©finit la psychose comme une modalitĂ© de dire non Ă la castration - c'est la la Verwerfung forclusion du signifiant du Nom-du PĂšre dans l'Autre du langage. S'en dĂ©duit une clinique discontinuiste les concepts structuraux - prĂ©sence ou absence du Nom-du-PĂšre - permettent d'Ă©laborer des classes et de rĂ©pondre dans le registre du certain. La fin de son enseignement annĂ©es 1970-1980 ouvre une autre perspective " Si l'Autre existe, on peut trancher par oui ou non ... quand l'Autre n'existe pas, on n'est pas simplement dans le oui-ou-non, mais dans le plus-ou-moins ... " Miller - 1998. Cette clinique nouvelle de l'Ă -peu-prĂšs, de l'approximation, est continuiste. Elle n'exclut ni la rigueur ni la postulation du mathĂšme. La psychose y devient un concept Ă©tendu, nullement Ă©puisĂ© par les seules formes des psychoses psychiatrisĂ©es. Il y a des sujets sans phĂ©nomĂšnes Ă©lĂ©mentaires, sans troubles du langage, sans dĂ©lire, sans errance, etc. Ils relĂšvent de la psychose ordinaire. Quelle clinique pour ces sujets ? Quelle place pour le psychanalyste ? Ce court essai rassemble deux sĂ©ries de cas. Dans la premiĂšre, des sujets psychotiques s'adressent Ă un analyste - au cabinet pour certains, dans le cadre hospitalier d'une prĂ©sentation de malades pour d'autres. Quels " bricolages " vont-ils trouver - ou ne pas trouver - grĂące au dispositif analytique ? Dans la seconde, trois cas de psychoses extraordinaires Rousseau, Schreber, A. Artaud trouvent leur issue dans un passage Ă l'Ă©criture. Chaque cas dĂ©montrera qu'effectivement " ne devient pas fou qui veut " J. Lacan - 1946 !
EspacesLacan. Espaces index. étapes Propos sur la causalité psychique J.Lacan, Bonneval "Ne devient pas fou qui veut." Mais c'est aussi que n'atteint pas qui veut, les risques qui enveloppent la folie. Un organisme débile, une imagination déréglée, des conflits dépassant les forces n'y suffisent pas. Il se peut qu'un corps de fer, des identifications puissantes, les
Faut-il avoir l'air fou pour l'ĂȘtre ? Peut-on l'ĂȘtre sans en avoir l'air et peut-on aussi en avoir l'air et ne pas l'ĂȘtre ? Voici quelques remarques et questions issues de ma clinique en institution A partir de situations d'adolescents hospitalisĂ©s, cette question de la psychose et de ce qu'il en serait de la spĂ©cificitĂ© de l'autisme et autres TED ou TSA pose celle de la nĂ©cessitĂ© ou non de soins psychiatriques pour certains. Il/elle n'a rien Ă faire là », peut-on en effet entendre assez rĂ©guliĂšrement, ce qui reviendrait Ă penser qu'il n'y aurait pas de soins nĂ©cessaires pour un enfant autiste, par exemple. D'une certaine façon, ceci peut apparaĂźtre rassurant, puisque cette remarque ne s'adresse pas aux seuls diagnostiquĂ©s ainsi, les remettant du mĂȘme coup au mĂȘme banc que les autres! Je crois que ce qu'il m'arrive le plus souvent d'avoir envie de dire, lors des rĂ©unions de service, en me rĂ©fĂ©rent au propos de M. Czermak dans La navigation astronomique c'est on ne peut - tout de mĂȘme - pas leur reprocher leurs symptĂŽmes, pour lesquels ils viennent nous consulter ou sont hospitalisĂ©s». La psychose est toujours sociologiquement incorrecte» dira-t-il aussi. Voici lĂ posĂ©e une indication, que j'aimerais plus universelle dans son acception, qui peut-ĂȘtre va de soi ici et qui cependant reste si difficile Ă faire accepter, sinon respecter dans nos institutions. Alors bien sĂ»r, c'est peut-ĂȘtre, particuliĂšrement Ă l'adolescence que les manifestations symptomatiques sont le plus difficiles Ă dĂ©brouiller, Ă dĂ©brouillonner», suscitant facilement du rejet au regard d'un certain non sens... bien loin d'une neutralitĂ© bienveillante. Jouent-ils au fou, le sont-ils vraiment ? Le rejet de toute Ă©tiopathogĂ©nie dans l'autisme, accentuĂ© par cette sĂ©paration psychose infantile/autisme, mais aussi bien dans tout le champ psychiatrique avec les nouvelles classifications qui n'ont plus de visĂ©es psychopathologiques mais simplement Ă©pidĂ©miologiques et pharmacologiques, accentue cette difficultĂ© Ă considĂ©rer ce qu'il en est du soin, au risque que ça fasse violence, hors sens tout simplement. Cette formule de Lacan Ne devient pas fou qui veut » reste pour moi toujours un repĂšre dans ces questions diagnostiques, formule dâhumour» dit-il... et pourtant si sĂ©rieuse Ă considĂ©rer dans la clinique. Difficile en effet de reconnaĂźtre les modalitĂ©s auxquelles un adolescent a recours pour tenter de mettre en jeu une subjectivitĂ© qui, pourquoi pas, s'est trouvĂ©e chahutĂ©e par le RĂ©el du sexuel de la pubertĂ©. Mon questionnement s'appuie sur la question du transfert et de ses diffĂ©rentes modalitĂ©s, puisque, rappelons-le, la premiĂšre institution est le transfert. Dans la psychose, qu'est-ce qui peut rendre le transfert, en institution et avec des adolescents psychotiques, difficile ? Que faire avec ces adolescents autistes de bon niveau, Asperger ou autres TED qui ne semblent pas aller mal ? Mais qu'est-ce qui rend tout aussi bien difficile lâaccueil d'une symptomatologie hystĂ©rique, entendue alors comme une façon de jouer au fou ? Mais tout aussi bien qu'est-ce qui donne Ă penser une hystĂ©rie par rapport Ă une psychose Ă l'adolescence ? Du petit grain de folie Ă la folie, quels repĂšres Ă l'adolescence sinon d'abord le transfert. Comment se faire l'interprĂšte et le traducteur dans la psychose, dans l'autisme, mais aussi bien dans certaines hystĂ©ries et auprĂšs de qui ? Du patient lui-mĂȘme tout autant que du soignant en manque de boussole ? Comment se faire l'interprĂšte de leurs symptĂŽmes ? Et pourquoi cela peut-il rater ? Ma proposition pour cette journĂ©e va consister Ă poser quelques unes des interrogations que la clinique en institution soulĂšve quotidiennement pour moi. Non pour y apporter une rĂ©ponse mais pour partager ici ces difficultĂ©s en vue d'un Ă©change. Je me souviens par exemple de cette indication de Corinne Tyszler Ă propos des adolescents psychotiques non dĂ©compensĂ©s Ne pas trop les pousser Ă subjectiver si ils sont psychotiques, au risque sinon de les faire dĂ©lirer» J'interroge aussi la pertinence d'ateliers thĂ©rapeutiques avec les autistes, qui favorisent la production imaginaire par exemple ? Mais aussi je prends appui sur cette remarque de Charles Melman Que faire face Ă un organisme qui reste dĂ©shabitĂ© ?» Toute approche institutionnelle doit ĂȘtre Ă©ducative, pĂ©dagogique mais aussi thĂ©rapeutique. Et comment donc concilier ces diffĂ©rentes composantes ? MĂ©thodes Ă©ducatives et comportementales qui bien entendu ne sont pas exemptes des questions en institution mais nous savons que toute rĂ©ponse standardisĂ©e, risque de ne pas tenir compte de la particularitĂ© de la structure. L'exclusivitĂ© d'une rĂ©ponse Ă©ducative est contestable. C'est le fait clinique singulier qui doit guider notre pratique. Tyszler indiquait dans son article Autisme pour qui sonne le glas ?» que les problĂšmes posĂ©s par les recommandations sont graves et vont directement influencer la vie de nos services puisque sous le terme TED, se trouvent en fait rĂ©unies des affections variĂ©es, souvent encore mal dĂ©limitĂ©es autisme et psychose infantile en particulier. Faut-il entendre que tout trouble grave du dĂ©veloppement sort dĂ©sormais du suivi habituel des unitĂ©s de pĂ©dopsychiatrie au profit d'une prise en charge exclusivement Ă©ducative et comportementale ?» La dimension institutionnelle doit ĂȘtre entendue dans sa fonction organisatrice du soin. Et c'est cette question que la clinique au quotidien avec des adolescents interroge actuellement. Une nomination» diagnostique a souvent Ă©tĂ© posĂ©e avant mĂȘme que nous les recevions, et nous devons en tenir compte, que le diagnostique s'avĂšre juste ou non d'ailleurs. Ne devient pas fou qui veut» Actuellement comme la cause n'est plus, il semblerait que la formule soit oubliĂ©e. Dans son texte, datĂ© de 1946, Propos sur la causalitĂ© psychique », J. Lacan Ă©crit Loin donc que la folie soit le fait contingent des fragilitĂ©s de son organisme, elle est la virtualitĂ© permanente dâune faille ouverte dans son essence. Loin quâelle soit pour la libertĂ© une insulte», elle est sa plus fidĂšle compagne, elle suit son mouvement comme une ombre. Et lâĂȘtre de lâhomme, non seulement ne peut ĂȘtre compris sans la folie, mais il ne serait pas lâĂȘtre de lâhomme sâil ne portait en lui la folie comme la limite de sa libertĂ©. Et pour rompre ce propos sĂ©vĂšre par lâhumour de notre jeunesse, il est bien vrai que, comme nous lâavions Ă©crit en une formule lapidaire au mur de notre salle de garde âNe devient pas fou qui veut.â » Dans son allocution sur les psychoses de l'enfant», Ă l'occasion de journĂ©es organisĂ©es par Maud Mannoni sur ce thĂšme , l'enfant, la psychose et l'institution» 22/10/67 Lacan regroupe les trois thĂšmes de l'enfant, la psychose et l'institution pour nous dire que nulle part plus qu'en ces trois thĂšmes, soit Ă©voquĂ©e plus constamment la libertĂ©.» et donne les coordonnĂ©es de l'aliĂ©nation du sujet, structurale, du fait mĂȘme de son rapport au langage. Le refus de l'aliĂ©nation fait en effet d'un sujet psychotique le sujet libre par excellence. Ce refus de l'aliĂ©nation est bien sĂ»r diffĂ©rent du refus nĂ©vrotique. Et cependant certaines modalitĂ©s de refus sont difficiles Ă cerner Ă cet Ăąge, l'adolescence, dont C. Melman rappelle qu'il est dĂ©ception face Ă l'ordre symbolique». Cette disposition Ă la dĂ©ception s'inaugure Ă cet Ăąge, dans le champ de la nĂ©vrose. Tout autre est le destin du psychotique Ă l'adolescence. Lacan poursuit Ă l'intĂ©rieur du collectif, le psychotique essentiellement se prĂ©sente comme le signe, signe en impasse, de ce qui lĂ©gitime la rĂ©fĂ©rence Ă la libertĂ©.», reprenant lĂ le propos de Jean Oury dans ces mĂȘmes journĂ©es. Dans son Discours de Rome» en 53, Lacan parle dĂ©jĂ de la psychose comme de cette libertĂ© nĂ©gative d'une parole qui a renoncĂ© Ă se faire reconnaĂźtre et la caractĂ©rise par la formation d'un dĂ©lire qui objective le sujet dans un langage sans dialectique. Dans le discours de Lacan aux psychiatres, il nous dit que l'angoisse devant la psychose est liĂ©e au fait que devant un psychotique qui ne demande rien, c'est nous qui demandons» Et ce sont sĂ»rement lĂ des points importants dans la difficultĂ© Ă recevoir certains jeunes. Ă Bonneval donc en 1946, lors de ces journĂ©es consacrĂ©es Ă la PsychogenĂšse des Psychoses et des NĂ©vroses, s'explicitait un point de discorde entre H. Ey et J. Lacan Ă propos des rapports entre folie et libertĂ©. La dĂ©sormais cĂ©lĂšbre phrase de Lacan, Ă©tait censĂ©e le cristalliser "L'ĂȘtre de l'homme, non seulement ne peut ĂȘtre compris sans la folie, mais il ne serait pas l'ĂȘtre de l'homme s'il ne portait en lui la folie comme limite de la libertĂ©". Lacan se devait, Ă ce moment lĂ , de contredire lâorgano-dynamisme dont s'Ă©tait fait le promoteur.» Ă cette question posĂ©e par de ce qu'il en est de la maladie mentale, il affirme lui une causalitĂ© psychique quâil repĂšre dans la discordance primordiale entre le Moi et lâĂȘtre », et il s'emploie Ă dĂ©velopper les effets psychiques du mode imaginaire». La folie y trouve lĂ sa structure fondamentale » nous dit-il. Le risque de la folie se mesure Ă l'attrait mĂȘme des identifications oĂč l'homme engage Ă la fois sa vĂ©ritĂ© et son ĂȘtre.» [...] le premier effet qui apparaisse de lâimago chez lâĂȘtre humain est un effet dâaliĂ©nation du sujet. Câest dans lâautre que le sujet sâidentifie et mĂȘme s'Ă©prouve tout d'abord[...] » Marc Morali dans son article un autisme peut en cacher un autre» rappelle que Lacan lors de ses journĂ©es de Bonneval avait clarifiĂ© la question de la psychogenĂšse le secret de la psychogenĂšse des psychoses, c'est qu'il n'y en a pas». Charles Melman rappelle d'ailleurs que le dĂ©bat entre organogenĂšse et psychogenĂšse est caduc, puisque la vie psychique a sa matĂ©rialitĂ© propre, celle du langage, la motĂ©rialitĂ©.» Cf billet d'actualitĂ© Ă propos des dĂ©bats sur l'autisme et de la position de notre association 11/03/2014 Marie-Christine Laznik parle d'une psychogenĂšse de l'autisme qui consiste dans le lent travail de destruction des compĂ©tences parentales que cette pathologie produit. La question Ă©tant de savoir si la psychanalyse, dans sa praxis, peut avoir de quoi permettre Ă un enfant, un bĂ©bĂ© de dĂ©couvrir le plaisir de susciter le plaisir chez l'autre. Les premiers sĂ©minaires de Lacan prĂ©cisent progressivement son approche de la psychose, notamment bien sĂ»r le sĂ©minaire III, Les structures freudiennes des psychoses» , en 1955-1956, complĂ©tĂ© de l'article Dâune question prĂ©liminaire Ă tout traitement possible de la psychose » fin 1957-dĂ©but1958. NĂ©vrose, psychose ou perversion se distinguent par des effets de structure et pour autant bien sĂ»r, Ne devient pas fou qui veut» toujours! Les structures cliniques sont dĂ©terminĂ©es dans leur rapport particulier Ă la castration, pour le psychotique la forclusion Verwerfung, pour le nĂ©vrosĂ© le refoulement VerdrĂ€ngung et pour la perversion le dĂ©ni Verleugnung . L'articulation des trois catĂ©gories du RĂ©el, de l'Imaginaire et du Symbolique permet d'Ă©clairer et de donner de nouvelles ficelles Ă la clinique. Dans son premier sĂ©minaire Ă©crits techniques», il indique dĂ©jĂ comment ce qui n'est pas venu au jour du Symbolique, apparaĂźt dans le RĂ©el.» C'est dans la rĂ©ponse au commentaire de Jean Hyppolite sur la Verneinung de Freud. L'enfant psychotique est dans un rapport particulier avec le RĂ©el. L'enfant autiste serait aussi confrontĂ© au pur RĂ©el. Pour E-M Golder, Au seuil de la clinique infantile» si tout enfant est pris dans la double partition dĂ»e Ă la naissance et Ă sa rencontre avec le fait du langage, l'autiste ne rĂ©pĂšte qu'une seule chose sa confrontation avec la bĂ©ance que celui-ci introduit. L'autiste est confrontĂ© au pur RĂ©el comme trou dans le symbolique.» Comme si l'enfant avait affaire Ă la faille dans le langage et c'est tout. Un organisme non dĂ©naturĂ© par le langage. Elle Ă©voque la maniĂšre dont la naissance s'est dĂ©roulĂ©e qui aurait empĂȘchĂ© le processus structural propre Ă ce moment. Elle parle d'un accident de l'encontre, un accident de l'appel et de l'adresse. A un moment oĂč la mĂšre est confrontĂ©e Ă un enfant RĂ©el, il y a trou dans le symbolique. Cela me rappelle ce jeune homme autiste que je revois Ă mon cabinet aprĂšs l'avoir suivi plus jeune au CMP ; sa mĂšre se plaint» Il rĂ©pĂšte toujours la mĂȘme chose, c'est pĂ©nible, c'est insupportable» Quand je lui demande de prĂ©ciser ce que son fils rĂ©pĂšte ainsi âJe m'en souviens plus !â E-M Golder sĂ©pare ou distingue le refoulement originaire qui met en place un lieu, dans un nouage RĂ©el/ Symbolique du refoulement primaire qui permet une inscription dans un nouage Imaginaire/ Symbolique. Est-ce offrir lĂ la possibilitĂ© d'un diagnostic diffĂ©rentiel entre autisme et psychose infantile, entre refoulement originaire et refoulement primaire ? M-C Laznik rappelle dans son article sur l'autisme qu'il n'y a pas d'absence s'il n'y a pas dĂ©jĂ prĂ©sence» et que concernant l'autisme, la non mise en place du rapport symbolique fondamental est liĂ© Ă ce dĂ©faut de la prĂ©sence originelle mĂȘme de l'Autre et non au dĂ©faut du temps absence comme dans la clinique d'autres Ă©tats psychotiques.» Si le ratage du processus de subjectivation est diffĂ©rent, comment concilier des soins ? Dans l'autisme c'est le processus d'aliĂ©nation lui-mĂȘme qui rate, dans la psychose, c'est le processus de sĂ©paration qui est en jeu. Y a-t-il inflĂ©chissement de l'autisme vers la psychose infantile ? Doit-on travailler dans ce sens ? C. Melman parle d'une affection prĂ©psychotique. Si la psychose en effet est le rĂ©sultat des dĂ©mĂȘlĂ©s avec le langage, l'autisme infantile est le fait d'avoir Ă©tĂ© dĂ©mĂȘlĂ© du langage» Dans l'autisme, tout se passe comme si l'enfant ne se laissait pas pĂ©nĂ©trer par quelque chose. Ce qui donne un nouage autre. De cet imaginaire dĂ©faillant, se constitue un stock d'expĂ©riences, de donnĂ©es peut-ĂȘtre diffĂ©rent effectivement de ce que l'on rencontre dans la psychose oĂč il s'agit d'un imaginaire sans moi, comme le rappelle M. Czermak. L'autiste n'est pas un enfant d'Ă©ros» disait C. Melman, il n'y a pas eu la possibilitĂ© de cette connivence, de cette Ă©rotisation nĂ©cessaire Ă l'acquisition du langage», d'oĂč cette difficultĂ© de travail avec eux. Il nous dit combien l'autisme infantile est le domaine oĂč peut se montrer aux plus aveugles le rĂŽle dĂ©terminant de la prise par le langage dans le dĂ©veloppement du bĂ©bĂ©.» Encore justement ne faut-il pas ĂȘtre aveugle pour visionner ces vidĂ©os ! Alors pour ces adolescents au diagnostique flou ? Ces crĂ©atures plus ou moins dociles, mais dĂ©shabitĂ©es ? Si l'autisme reste une maladie de la relation, quels soins ? Puisque nĂ©anmoins ils sont hospitalisĂ©s, au dĂ©cours de difficultĂ©s d'inscription sociale, mais aussi au regard d'une certaine souffrance. Peut-ĂȘtre sans demande particuliĂšre mais avec des symptĂŽmes qu'on ne peut leur reprocher donc et qui ne sont pas simplement des troubles. L'institution a pour fonction de traiter le RĂ©el et de cette libertĂ© paradoxale bien entendu, il ne s'agit pas d'en faire l'Ă©loge ou la promotion mais bien de voir comment une armature symbolique peut ou non faire supplĂ©ance pour un sujet. Voici plusieurs petites vignettes cliniques sur cette question de l'apparente libertĂ© dans la psychose et/ou l'autisme et de ce vers quoi doit tendre notre travail. Reprenons encore Lacan dans la conclusion de son allocution sur les psychoses de l'enfant» Quelle joie trouvons-nous dans ce qui fait notre travail ?» Un psychotique doit-il participer aux tĂąches mĂ©nagĂšres ? Et un autiste alors ? Quelles seraient les recommandations de bonnes pratiques en institution hospitaliĂšre ? Alors doivent-ils tous participer de la mĂȘme façon Ă la vie du service ? Oui bien sĂ»r, aussi bien que Non et dans quelle mesure le coup de balai souhaitĂ© par le soignant risque-t-il de faire mal ? Coup de balai... non pas sur les soldes ou sur une liquidation quelconque, sinon symbolique avec le risque de recevoir un coup avec le balai. Alors bien sĂ»r cette Ă©quitĂ© des tĂąches, ce souhait d'un fonctionnement qui serait le mĂȘme pour tous semble ĂȘtre une boussole pour les soignants plus aisĂ©e que celle qui consiste Ă repĂ©rer pour chacun des patients ce qu'il peut ou ne peut pas, tenant compte de sa pathologie. C'est le cas pour cette patiente psychotique qui ne peut que donner un coup de balai, ne peut pas passer le balai. IncomprĂ©hension de l'Ă©quipe, risque d'une certaine maltraitance Ă vouloir insister, on lui en fait donc le reproche Elle ne peut pas faire que ce qu'elle veut». Autre interrogation, ceux qui sont lĂ pour rien». C'est lĂ le reproche qu'on leur fait. V. 13 ans. Naissance dans le sud, dĂ©mĂ©nagement Ă 6 ans pour le travail du pĂšre, sa mĂšre travaille aussi, deux sĆurs. SĂ©paration des parents il y a un an, un week-end sur deux chez le pĂšre. Mr et Mme viennent ensemble accompagner V Ă son entrĂ©e dans le service et spontanĂ©ment pensent ĂȘtre reçus ensemble par le mĂ©decin responsable. Lors de notre premiĂšre rencontre, V rĂ©pond volontiers Ă mes questions mais sans plus, sans rien de plus. Il est hospitalisĂ© depuis quelques jours. Avant je rĂ©pĂ©tais que je voulais mourir, que j'Ă©tais nul. Mais c'est bon lĂ , j'ai arrĂȘtĂ© de rĂ©pĂ©ter. Ăa fait longtemps, c'Ă©tait il y a 3 semaines. J'ai rien lĂ . Je veux rentrer chez moi » Je lui demande ce qui se passe - ce qui me manque c'est ma maison et maman.» â Et vos soeurs ? » â Non », Le Dr, pour m'embĂȘter, il a dit, je vais l'emmener lĂ -bas. J'ai rien ». Accepte de me dire un peu son histoire, j'ai un petit peu un trouble envahissant du dĂ©veloppement, depuis petit je vais voir des personnes ». Ne peut dire plus, ni les noms ni les qualitĂ©s des professionnels. Ne connait pas les prĂ©noms des autres jeunes hospitalisĂ©s avec lui. Ne sait pas dans quelle Ă©cole sa mĂšre travaille. En difficultĂ© scolaire, trop difficile l'anglais et les maths ». Je lui demande s'il souhaiterait de l'aide, Non ». Au 2Ăšme entretien, Ă la question de savoir comment il se sent, il me rĂ©pond mal, comme d'habitude». Et ce sera toujours cette mĂȘme rĂ©ponse, Ă chaque entretien. Je note ici qu'il lui est difficile de repĂ©rer le registre de l'Ă©nonciation de celui de l'Ă©noncĂ©. Il n'entend que l'Ă©noncĂ© qui lui semble du coup tout Ă fait rĂ©pĂ©titif d'une sĂ©ance Ă l'autre. Rien ne s'entend de mon Ă©nonciation, juste un Ă©noncĂ©. M-C Laznik rappelait comment cela leur restait inouĂŻ ce que dit Lacan dans l'Ă©tourdit Qui parle s'oublie dans ce qui se dit derriĂšre ce qui s'entend». Il ne semble pas repĂ©rer quelque chose de l'affect dans la voix, qui se rĂ©duit donc pour lui Ă un Ă©noncĂ© Cf l'interview de M-C L par Paule Cacciali et Josiane Froissart dans un JFP. S. Calmettes parlait de cette question de l'exactitude dans l'autisme, pas de la vĂ©ritĂ©, puisqu'il n'y a pas de possibilitĂ© de sous-entendu, ce qui rend le parler singulier, un parler sans voix, une langue sans perte, une langue exacte mais immobile. Peu prolixe, il s'exprime sur un ton monocorde, sans hĂ©sitation aucune. Il semble en difficultĂ© avec le temps. Il n'exprime ni besoin, ni demande, semble subir la situation d'hospitalisation. A vu sa mĂšre la veille au soir en visite, ne lui a pas demandĂ© de rentrer. Je m'intĂ©resse Ă ce qu'il a fait dans le service la veille, avec qui il Ă©tait en atelier et lĂ encore impossible de dire les prĂ©noms des autres jeunes. Je lui fais remarquer et il est d'accord j'ai du mal Ă retenir les prĂ©noms et les noms». Je lui reparle de l'anglais, de la langue anglaise. Il me dit avoir dĂ©jĂ Ă©tĂ© Ă Londres c'est bon, j'ai tout visitĂ©.» Il me cite alors les marques de voitures qu'il a vues, car c'Ă©tait un dimanche, Ă Londres des Maserati, des Lamborghini, des Ferrari ». Manifestement un bon souvenir. Pas de problĂšme ici de mĂ©moire pour les marques de voiture yâen a une Ă la gare, qui fait taxi, si vous voulez.» Spectre autistique ou TED ? DiagnostiquĂ© par le CRA Centre de ressource pour l'autisme Trouble envahissant du dĂ©veloppement non spĂ©cifiĂ© d'intensitĂ© lĂ©gĂšre avec compĂ©tences cognitives normales supĂ©rieures. Le motif de l'hospitalisation est finalement quand mĂȘme celui d'une Ă©valuation diagnostique, au regard de ce qui est considĂ©rĂ© comme soit - un autisme atypique - un syndrome d'Asperger - un TED non spĂ©cifique. C'est finalement la prĂ©sence d'un trouble anxieux associĂ© qui interpelle l'Ă©quipe du CRA, interrogation face Ă un syndrome dĂ©pressif avec mise en scĂšnes morbides de sa propre mort». Faut-il ou non un traitement pour cet enfant ? Dans le dossier du CRA, il est notĂ© au titre de l'anamnĂšse que les premiĂšres inquiĂ©tudes des parents ont commencĂ© peu avant 2 ans lorsque la famille a dĂ©mĂ©nagĂ© et que la premiĂšre de ses sĆurs est nĂ©e. Je garde en mĂ©moire cette indication de Pierre Delion sur le fait que lorsque les parents signalent une diffĂ©rence inquiĂ©tante dans le dĂ©veloppement de leur enfant, ils ont raison. Bien sĂ»r je retiens cette question de sa difficultĂ© avec les noms. E-M Golder, dans Au seuil de la clinique infantile, Ă©voque au travers d'un cas d'enfant ce qui dit-elle est un signe de la psychose infantile, la difficultĂ© de diffĂ©rencier le patronyme du prĂ©nom». Elle cite M. Czermak dans Patronymies p 143 Le nom n'est pas -comme tel- un rĂ©fĂ©rent, mais ce Ă partir de quoi il peut y avoir de la rĂ©fĂ©rence» Ici on a l'impression que les prĂ©noms ne sont pas arrimĂ©s Ă un sujet. Comment ça va ?» Comme d'habitude.» Une certaine forme d'incrĂ©dulitĂ© dans le ton, ma question rĂ©pĂ©tĂ©e ainsi Ă chaque rencontre... Il ne se sent pas vraiment concernĂ© par ma question. Je suis surprise de le voir les larmes aux yeux. Le mĂ©decin psychiatre lui a parlĂ© de reprendre sa scolaritĂ© Ă partir de l'hospitalisation, ce qu'il ne veut pas ; Il lui a demandĂ© d'y rĂ©flĂ©chir jusqu'au lendemain ça sert Ă rien d'y rĂ©flĂ©chir, c'est non. Je ne veux pas. Je lui ai dit. Demain ce sera pareil J'ai besoin de voir ma mĂšre le matin, d'ĂȘtre chez moi.» En mĂȘme temps me redit qu'il ne veut pas reprendre l'Ă©cole, ça sert Ă rien, c'est fait pour embĂȘter...» ; aucune interrogation possible. Ces larmes sont-elles juste d'Ă©nervement ou de tristesse ? Sa mĂšre est en arrĂȘt de travail depuis son hospitalisation elle ne sait pas quand je sors, donc elle ne peut pas travailler». Difficile pour l'Ă©quipe de travailler avec ce jeune garçon qui ne semble pas souffrir, n'accepte pas son hospitalisation, ne pose pas de problĂšme particulier sinon cette rigiditĂ© et froideur. Que peut-on lui apporter ? D'une certaine façon, c'est un jeune homme sans symptĂŽme, comme un certain nombre d'autres adolescents autistes que nous recevons, avec quelques troubles des conduites et des comportements. François Benrais dans son article un psychanalyste est battu» rappelle que ce qui fait vĂ©ritĂ© pour un sujet, n'est pas vĂ©ritĂ© pour l'institution. Il faut que celle-ci puisse ĂȘtre lue et entendue par l'institution. Or, interroge-t-il aujourd'hui n'est-ce pas la dĂ©textualisation qui renforce une censure», l'activitĂ© d'une institution de soin Ă©tant rabattue effectivement Ă celle d'un service oĂč priment la question de la gestion des lits et de la file active. Notre travail reste toujours celui d'une lecture des symptĂŽmes cependant et comme il le souligne ce n'est pas en inventant des rĂšgles supposĂ©es adaptĂ©es que pour autant il y aura de l'acte. ...Ăa c'est une procĂ©dure de l'action, elle ne permet en rien un acte.» Comment faire avec lui par exemple ? L'institution a pour fonction de traiter le RĂ©el, au travers d'une armature symbolique qui fait supplĂ©ance. Si l'homme reçoit sa dĂ©termination du langage, l'homme en tant qu'il est normal n'est pas libre mais assujetti au symbolique. Et c'est ce travail de nouage qu'il convient de faire. Mais il y rĂ©siste ou n'en veut pas. Bien sĂ»r une part du travail sera dans l'Ă©coute et l'accompagnement des parents, perdus avec ce diagnostic pas clair oĂč se cĂŽtoient tant de termes lĂ©ger mais envahissant, non spĂ©cifiĂ©, normal, supĂ©rieur... Je garde cette indication si prĂ©cieuse du travail de M-C Laznik il faut que je trouve moyen d'ĂȘtre en place de tierce personne au sens oĂč Lacan emploie ce terme dans le sĂ©minaire V pour construire S de A barrĂ©, il faut que j'arrive Ă donner et mon Ă©merveillement, et ma surprise et mon plaisir»...S de A barrĂ©, donc marquĂ© d'un manque sans quoi il ne peut y avoir de surprise ». B diagnostiquĂ©e autiste de haut niveau 15 ans, me prĂ©cise mon prĂ©nom, c'est l'Ă©criture anglophone», son patronyme est français. HospitalisĂ©e suite Ă une dispute trĂšs violente avec sa mĂšre. Naissance dans une autre rĂ©gion ma mĂšre dans la mĂȘme maternitĂ© que sa mĂšre. Si ça se trouve j'irai accoucher lĂ -bas moi aussi pour la tradition». SĂ©paration de ses parents quand elle a 2/3 ans. Il est indiquĂ© dans son dossier une acquisition prĂ©coce de la lecture Ă l'Ăąge de 3 ans. Suivi psychomotricitĂ© j'avais mon Ă©quilibre vraiment nul. Je suis incapable de faire du vĂ©lo, je suis nulle en rollers...». Se met Ă parler beaucoup de rollers, de la couleur des rollers, du fait que tiens, j'en n'ai pas fait depuis longtemps, en fait je sais pas oĂč ils sont, il faudrait que je les retrouve». AprĂšs vit un an chez mamie avec maman, vers 4/5 ans». Sa mĂšre rencontre un homme. DĂ©mĂ©nagement avec mĂšre et beau-pĂšre, pour mutation professionnelle de celui-ci. PĂšre restĂ© dans la rĂ©gion d'origine. Je lui demande si son pĂšre vit seul non avec une nouvelle compagne, enfin faut que j'arrĂȘte de dire nouvelle, ça fait 6 ans. On s'entend bien, on Ă©coute la mĂȘme musique, Placebo, et...». Me cite pleins de noms d'autres groupes, me parle de musique, de sa chambre, de son MP3... Je reviens avec une nouvelle question au bout d'un moment. Savoir comment ça s'est passĂ© Ă l'Ă©cole primaire. Suivi psychologue, sans savoir pourquoi je sais pas, je me souviens juste de son nom». AprĂšs suivi CPEA centre psychothĂ©rapeutique enfants ados, suivi 3 œ journĂ©es par semaine, Ă M pour ĂȘtre prĂ©cise. C'est restĂ© comme ça pendant 2 ans». - Je sais pas ce que j'avais comme problĂšme» - Et maintenant savez-vous ?» - Je serai Asperger» Suivi SESAD au collĂšge, psychologue, psychomotricitĂ© et Ă©ducatrice, puis la famille dĂ©mĂ©nage pour un an dans une autre ville en 4Ăšme. Nouveau dĂ©mĂ©nagement en 3Ăšme en septembre dernier. - Mon dossier MDPH a Ă©tĂ© envoyĂ© quand on est parti de... mais il n'a toujours pas Ă©tĂ© traité». - Vous suivez bien vos affaires!» - Je rĂ©pĂšte ce que ma mĂšre dit. J'aimais bien lĂ -bas, c'Ă©tait bien, moins polluĂ©, la mer plus claire, j'avais pleins d'amis, d'ailleurs mon petit ami actuel est lĂ -bas» - Et en 4Ăšme ? Comment cela s'est-il passĂ© ?» - Rien, enfin 3 hospitalisations pour crise clastique, suite Ă des disputes avec ma mĂšre». Mais B ne peut rien en dire sinon - j'ai l'impression que je suis incompatible avec ma mĂšre. Moi j'ai pas de compatibilitĂ© d'humeur avec ma mĂšre» - Alors Asperger, asperger, aspergĂ©, vous le prononcez comment » ? - Je suis pas mouillĂ©e, mais j'aime bien l'eau» rigole - Vous en pensez quoi ?» - J'en pense rien, j'ai lu sur ça Je suis nĂ© un jour bleu» de Daniel Tammet, j'ai surtout appris des choses sur la synesthĂ©sie, moi je le suis pas ! Moi je suis nulle en maths, je suis pas synesthĂ©sique ça c'est sĂ»r». Il paraĂźt que si je suis trĂšs bonne en langues, c'est peut-ĂȘtre que je suis Asperger. Je suis archi-bonne». - Vous ne savez pas pourquoi ils ont choisi un prĂ©nom anglophone vos parents ? Ăa vous a peut ĂȘtre donnĂ© le goĂ»t des langues, non ?» - Je sais pas». Moi j'adore Ă©crire, j'ai choisi un nom d'auteur Ă l'anglaise, j'ai remarquĂ© aprĂšs qu'il y avait le dĂ©but de mon nom de famille, faudra que je me fasse Ă©diter, enfin faut dĂ©jĂ que je finisse une histoire ». - Ca porte sur quoi ?» - Le fantastique, je n'Ă©cris que du fantastique» - Vous m'Ă©cririez quelque chose ?» - J'ai pas de quoi Ă©crire, j'ai juste des vĂȘtements et un doudou» - Vous avez un doudou ?» - Oui Doudou lady, c'est le seul qui n'a pas changĂ© de prĂ©nom de tout le temps oĂč je l'ai eu. Lady je pensais que c'Ă©tait un prĂ©nom, c'est Ă cause de Lady Gaga. C'est un petit bĂ©bĂ© panthĂšre avec un nĆud rose, les autres je leur change tout le temps de nom. Je retiens pas bien les noms, ah si en fait, le nom de la psychologue je m'en souviens. Ce sont les prĂ©noms, j'arrive pas Ă les retenir avec les tĂȘtes qui vont avec. J'avais Ă©conomisĂ© pendant longtemps pour me l'acheter. Je me souviens quand j'Ă©tais petite, j'attachais avec un ruban autour du cou et de l'autre cĂŽtĂ© Ă mon poignet. Comme ça si elle tombait et que je me rĂ©veillais la nuit, je pouvais le rattraper, je dors dans un lit superposĂ©, s'il passe au dessus du lit, je le rattrape ». Du fort/da Ă sa façon! PrĂ©sence/prĂ©sence plutĂŽt que prĂ©sence/absence, ici ce n'est pas dans la symbolisation que ça se joue, il s'agit plutĂŽt d'une technique. Me dĂ©crit ensuite tous ses lapins, ses autres peluches...Difficile de l'arrĂȘter. - On a du mal Ă comprendre quand on vous voit comme ça, qu'est-ce-qui fait que vous vous disputez avec votre mĂšre ?» - Je suis pas compatible, comme je vous l'ai dit». Finalement ne restera pas hospitalisĂ©e, les parents, pour des raisons personnelles, demandent la levĂ©e de l'hospitalisation. Alors est-ce une jeune fille Asperger ? Lors de sa prĂ©cĂ©dente hospitalisation, il Ă©tait notĂ© dans le compte-rendu mĂ©dical TED associĂ© Ă des traits de personnalitĂ© pathologiques». Elle me laissera cependant un dĂ©but de roman, Ă©crit aprĂšs l'entretien que je ne livrerai pas ici mais comme dans l'entretien, elle peut trĂšs vite enfiler les mots, les uns aprĂšs les autres, le ciel, la lune, le soleil⊠Est-ce une production imaginaire ? Est-ce juste un exercice de style ? La structure du rĂ©cit Ă©voque le bĂątiment du service. Mon bureau est en bas, les chambres sont Ă l'Ă©tage, pour dormir. Je retrouve quelques Ă©lĂ©ments de l'entretien, notamment le pĂšre, qu'elle dit ne pas voir souvent. Une suite de chiffres me fait penser Ă l'auteur dont elle me parlait. Elle a effectivement un peu d'avance aussi. Il ne me reste donc que le texte et cet entretien pour y trouver des points d'appui diagnostiques. RĂ©agit-elle Ă l'Ă©quivocitĂ© d'Asperger ou finalement est-elle juste prise dans cet enchainement rapide d'un mot qui en suit un autre ? On pourrait presque croire Ă une quĂȘte hystĂ©rique mais peut-ĂȘtre y manque-t-il les affects, le ton est descriptif, exclusivement. C'est de l'instinct dont il s'agit», dit-elle. Rien d'une production dĂ©lirante, un travail de collage peut-ĂȘtre, des fragments pris ça et lĂ , juste une destinĂ©e Ă©trange» assurĂ©ment. Le nouage Imaginaire/ symbolique n'opĂšre pas, semble-t-il. SĂ»rement un autre moment d'incompatibilité» la fera revenir. Autre rapport Ă la libertĂ© A, Jeune fille lycĂ©enne, que je reçois, au dĂ©cours d'une hospitalisation, suite Ă une fugue de plusieurs nuits, pour des raisons qu'elle a du mal Ă justifier. Je sais pas, je suis partie quelques jours, chez ma copine.» HĂ©bergĂ©e chez une amie majeure vivant seule, meilleure amie, amante, elle rentre sans affect particulier au domicile, comme Ă©tonnĂ©e de l'inquiĂ©tude suscitĂ©e par cela. Est d'accord pour venir, sans demande particuliĂšre au demeurant. Ses parents sont sĂ©parĂ©s depuis plusieurs annĂ©es, ça pose pas de problĂšme» dira-t-elle. Mme en couple avec un autre homme, pĂšre dans une nouvelle union c'est sa life». Assez maniĂ©rĂ©e dans les attitudes, elle ne me semble pas hystĂ©rique cependant. â Comment ça va» ? â Ăa va toujours». Est-ce dire que ça continue d'aller depuis la derniĂšre sĂ©ance ou bien que ça va toujours, pris dans une intemporalitĂ© radicale. Je ne la vois que depuis peu, certes son corps tout dĂ©braillĂ© malgrĂ© la tempĂ©rature hivernale m'interpelle mais ... Ne serait-ce lĂ qu'un trait adolescent du traitement de la mĂ©tĂ©o ? Elle Ă©voque ses amitiĂ©s, les nouvelles, les anciennes, les ruptures.... â C'est le grand mĂ©nage». â le remue mĂ©nage » ? Je demande. - De toute façon, on va bientĂŽt dĂ©mĂ©nager. Mon pĂšre a achetĂ© une maison tout prĂšs, dans le mĂȘme quartier.» Je reviens sur ses amitiĂ©s, Ă l'origine de cette fugue, disparition de quelques nuits - J'ai pas envie de m'Ă©taler, je les ai vues en peinture toutes ces histoires. C'est un dossier clos». Mon pĂšre m'a privĂ©e de tĂ©lĂ©phone parce que je suis rentrĂ©e en retard hier. Mon pĂšre il m'a dit me prends pour un idiot. Il est donne la profession de celui-ci, je sais bien qu'il est pas idiot ». Je ne suis pas le genre de personne qui pense Ă prĂ©venir si elle est en retard, ou qui s'excuse du retard en rentrant. C'est un constat, je suis en retard, pas la peine de le prĂ©venir, il l'aura constatĂ© aussi.»... Je vais pas l'abandonner...comme abandonner de faire un instrument de musique par ex». Puis me parle de ses rĂ©sultats scolaires de ces derniers jours - J'ai pas travaillĂ© plus, ni moins, mais je chute. C'est comme ça» Le Bac, c'est un peu dĂ©goutant». Je me sens au bout du gouffre, j'ai besoin de vacances». Me parle de la difficultĂ© qu'elle a en ce moment - ça m'Ă©nerve d'ĂȘtre Ă nouveau sensible, avant je m'en foutais complĂštement. En mĂȘme temps, je suis en colĂšre, je suis Ă©nergique.» Ăvoque alors dans un dĂ©sordre manifeste plein de choses - En 4Ăšme j'ai subi un harcĂšlement, un cyber harcĂšlement aussi». Actuellement j'ai un ami avec qui j'ai des relations sexuelles, c'est pas un petit ami, c'est un partenariat». Cette jeune fille accueillie en atelier thĂ©rapeutique l'an passĂ© avait suscitĂ© exaspĂ©ration, aucune adhĂ©sion au soin, qu'elle ne contestait pas d'ailleurs, aucune empathie, ses comportements Ă©tant jugĂ©s de type hystĂ©rique. Elle jouait la folie pour ceux qui la recevaient. Trop libre, trop dĂ©vergondĂ©e semblait-il. Pas assidue, pas ponctuelle, Ă©parpillĂ©e. Le suivi s'Ă©tait progressivement arrĂȘtĂ© jusqu'Ă ce que je la reçoive. C'est son apparente dĂ©sinvolture, cette libertĂ© qu'elle prend dans la relation Ă l'autre qui n'ont pas Ă©tĂ© apprĂ©ciĂ©es, ou si... au contraire apprĂ©ciĂ©es et non pas repĂ©rĂ©es comme des signes cliniques. - Je suis quelqu'un qui traine un peu partout. Ăa va bien, j'ai un nouveau copain. L'autre, il m'avait recalé». - RecalĂ© ? - Je sais pas comment dire autrement, recalĂ©e c'est tout. Il m'a refusĂ©e si vous voulez, c'est plus poĂ©tique, comme Apollinaire, je prĂ©fĂšre Verlaine ceci dit». J'ai toujours envie de dormir en ce moment, avant j'Ă©tais presque une ex-addict...». Je suis Ă©moustillĂ©e, ça a divaguĂ© hier». Me parle de sa derniĂšre peine d'amour impossible». Jeune fille sans arrimage, trĂšs free» comme elle aime Ă me le dire et pourtant... LĂ aussi cette libertĂ© dont on pourrait la penser maĂźtre, lui cause bien des soucis, la cause dans un rapport aux autres de plus en plus difficile. Certains de ces cas que nous recevons en institution, relĂšvent d'avantage du champ de l'autisme, d'autres de ce qui serait peut-ĂȘtre une forme de schizophrĂ©nie infantile, d'autres sont dans le champ de la psychose infantile, ou d'une psychose non dĂ©compensĂ©e de l'adolescence, tous ont ce rapport particulier Ă la libertĂ© qu'ils n'ont pas choisi. Cette apparente libertĂ© est dans tous les cas, liĂ©e au dĂ©faut de refoulement. Encore faut-il ne pas ĂȘtre dans le dĂ©ni de l'inconscient. C. Tyszler interrogeait la possibilitĂ© pour un autiste d'accĂ©der au refoulement originaire par le biais du transfert. M-C Laznik indique que la ligne de fracture est bien plus sur le type de clinique Ă laquelle on est confrontĂ©. Alors peut-ĂȘtre encore, la remarque du pĂšre d'un jeune garçon - psychose infantile - suivi en hĂŽpital de jour, est-elle Ă©clairante. Il est amenĂ© Ă consulter au Centre de Ressources pour l'Autisme et revient avec un diagnostique d'autisme pour son fils C'est vrai peut-ĂȘtre que des fois il est autiste, mais des fois quand mĂȘme il est vraiment fou.» Pour conclure, je reprends encore Lacan dans son allocution sur les psychoses de l'enfant» est-il loisible ici d'un saut d'indiquer qu'Ă fuir ces allĂ©es thĂ©oriques, rien ne saurait qu'apparaĂźtre en impasse des problĂšmes posĂ©s Ă l'Ă©poque.» . 383 539 738 596 564 23 201 631